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Dispute ornithophilo-féline

Els Laufer - Jean-François Cavin
La Nation n° 2062 20 janvier 2017

Je préfère les oiseaux aux chats

C’est Jean-François Cavin qui a commencé. Je lui racontais les tristes tas de plumes que nous trouvons le matin dans notre jardin. Je lui disais cette invasion de chats qui éliminent les mésanges, les rouges-gorges et autres présences ailées dans nos arbres, et je m’attendais à sa compassion pour ces oiseaux. Rien de tel; Jean-François Cavin préfère les chats aux oiseaux!

Les chats ont un charme, c’est sûr, mais ce sont des animaux domestiques, et les oiseaux sont libres. Ils sont comme des fleurs sans tige, ils font partie du ciel.

C’est l’homme qui nourrit le chat, et si celui-ci tue les oiseaux, c’est pour assouvir un instinct qui n’a plus de sens. Comparez une fois le charme lascif du chat et les mouvements vifs et exquis d’un moineau qui s’est posé sur une branche. Il regarde autour de lui, tournant sa petite tête aux yeux ronds d’une façon si légère et rapide qu’on ne peut que sourire. Ensuite il fait un petit saut, il s’est tourné, et il regarde le monde d’un autre côté. Et voilà, il s’envole, on ne sait comment, il est suspendu entre ses ailes et il va se poser un peu plus loin. Et si cette nuit il s’endort, petite boule de plumes dans un arbre, et que ce gros chat du voisin l’attrape rien que pour le plaisir, eh bien, je ne saurais préférer ce prédateur domestique à l’oiseau de nos jardins. C’est l’homme qui a introduit le chat, mais mon moineau, il est venu tout seul, il se nourrit tout seul. Nos chats, ils n’ont qu’à rester dans la maison de leur maître, manger leurs croquettes et digérer sur un peu de sable dans leurs bacacachat.

Els Laufer

 

Je préfère les chats aux oiseaux

Les amoureux fervents et les savants austères,

Aiment également, dans leur mûre saison,

Les chats puissants et doux, orgueil de la maison,

Qui comme eux sont frileux et comme eux sédentaires.

 

Même si l’on n’est plus – du fait de l’âge et du veuvage – un amoureux fervent et qu’on n’a jamais été un savant austère – ni l’un ni l’autre – il est permis d’aimer les chats, puissants et doux. Els Laufer, bien sûr, a raison dans tout ce qu’elle écrit (ou presque, on y reviendra), mais elle omet ceci:

1. Le chat ronronne, l’oiseau pas. Le ronron vous a quelque chose d’intimement, chaleureusement, sympathiquement, amicalement, philosophiquement confortable qui vous fait chaud au cœur, plus qu’aucun pépiement d’oiseau.

2. Caresser un chat, c’est une pure jouissance. D’ailleurs, il le sait et ne se livre pas à vous sans jugement (on y reviendra aussi). Caresser un oiseau? Le bec pique et les pattes grattent; cette chose tremblotante (si vous osez la prendre dans votre main) n’est pas faite pour cette communion délicieuse.

3. Les yeux du chat sont un monde. Ceux de l’oiseau, si d’aventure on les distingue, sont fixes et perçants. Le félin domestique, lui, nous offre une gamme de regards, de la rondeur innocente à la fente mystérieuse, qui exprime tous les états de l’âme.

4. …Y compris la sévérité du jugement. Car le chat, familier et sauvage, dormeur et chasseur, joueur et philosophe, sait bien qu’il est supérieur à l’homme. Ce n’est pas par hasard que certaines civilisations en firent une divinité.

Chasseur donc, par nature, au grand dam de la gent ailée. Pourquoi les rouges-gorges s’obstinent-ils à bâtir leurs nids à portée de chat? Els Laufer, étonnamment, invoque le droit du premier habitant; le volatile commun serait du pays bien avant le chat, venu peut-être une fois de l’Orient. Il semble toutefois que minet est des nôtres depuis assez belle lurette – plus que la troisième génération – pour qu’on ne conteste plus sa naturalisation.

Jean- François Cavin

 

Epilogue

Vous et moi, Jean-François, nous n’allons pas accuser les animaux d’être ce qu’ils sont: le chat est carnassier; le rouge-gorge construit son nid là où il peut. Vous aimez le ronron et le miaulement (?) des chats, moi, j’aime, au printemps surtout, le concert matinal des oiseaux qui chantent. Reste qu’il y a peu de chats tués par les oiseaux, et j’en suis bien contente pour vous.

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