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Comment couvrir le coût des soins du 3e âge?

Jean-François Cavin
La Nation n° 2063 3 février 2017

La boîte à idées Avenir Suisse, favorablement relayée par le Centre Patronal (Service d’information du 25 janvier), propose l’institution d’une épargne obligatoire pour financer les soins et l’hébergement rendus souvent nécessaires par le grand âge. La Suisse, grâce aux initiatives privées et à l’action de ses cantons, a mis en place un dispositif développé et efficace, mais qui a son prix. Et comme les personnes qui recourent à ces services ne peuvent souvent pas les payer entièrement et que l’assurance-maladie ne couvre qu’une faible part de frais, c’est la main publique qui fonce pour le reste, principalement par le truchement des prestations complémentaires (PC) AVS. Elles bénéficient à environ la moitié des pensionnaires des EMS, pour un montant annuel de presque 5 milliards. L’augmentation a été de 3 milliards environ depuis dix ans et l’on doit s’attendre à ce que la hausse se poursuive en fonction de l’évolution démographique. Les soins à domicile sollicitent aussi un financement public pour une part des coûts. Le total des versements publics atteint 7 milliards et pourrait doubler, voire plus, d’ici 2040, si l’on ne suit pas de nouvelles pistes.

Avenir Suisse propose la création d’une épargne-vieillesse obligatoire pour l’assistance et les soins liés à l’âge. Chacun serait astreint, à partir d’un certain âge (par exemple 55 ans) à verser chaque mois un certain montant sur un compte d’épargne (200 francs mensuels permettraient d’accumuler près de 100’000 francs jusqu’à la fin de la vie) pour financer les soins dont il aura besoin. Au décès, les héritiers toucheraient la part non utilisée de cette épargne, ainsi récompensés s’ils ont pris en charge leur parent. Les PC pourraient dès lors être consacrées à une aide beaucoup plus ciblée en faveur des plus démunis, qui n’auraient pas eu les moyens de constituer l’épargne.

Cette idée mérite examen et soutien dans son intention générale. L’hébergement en EMS est fort coûteux, de même que les soins à domicile dont la rationalisation est malaisée. Ces frais doivent être pris en charge par les bénéficiaires des prestations autant que possible et non surcharger la population active – via l’impôt alimentant les PC – qui doit faire face à bien d’autres dépenses. Cela d’autant plus que les personnes âgées semblent jouir assez souvent d’une situation financière relativement confortable, mais ne sont nullement enclines à épargner pour les soins de fin de vie, assurées qu’elles sont du secours public.

Plus généralement, toute proposition tendant à ventiler les coûts de l’action sociale entre plusieurs sources de financement spécifiques doit être saluée. En effet, la «sécu» générale est un tonneau sans fond et son alimentation par l’impôt redistribué engendre irresponsabilité et perte de maîtrise. Au contraire, la segmentation du financement de l’action sociale selon les risques et la «clientèle» appelée à y contribuer, favorise une gestion plus concrète et une surveillance plus attentive; lorsque l’institution spécialisée va tomber dans les chiffres rouges, on cherchera d’autres solutions que le recours aux deniers publics.

La concrétisation de l’idée que nous décrivons ici pose néanmoins diverses questions, dont nous ne retiendrons que trois.

L’épargne en vue du grand âge doit-elle être obligatoire, comme le veut Avenir Suisse ? Ou pourrait-on imaginer un système volontaire, favorisé par une complète exonération fiscale des cotisations, et certains avantages tels que le libre choix de l’EMS et la disposition d’une chambre à un lit?

Doit-on concevoir une simple épargne, ou plutôt une assurance? Les besoins futurs de chacun sont imprévisibles individuellement – les uns «mourant en bonne santé», les autres sollicitant longtemps les services adaptés à leur dépendance. Peut-être devrait- on donc préférer la mutualisation des risques.

Enfin, il convient de s’assurer que le système proposé permettrait effectivement de couvrir une part importante des coûts. Les vieillards les mieux nantis, aujourd’hui, paient les frais d’assistance et de pension par leurs propres moyens. Les plus démunis ne pourront pas cotiser à l’épargne en vue du grand âge. Il s’agit de vérifier que la grande majorité de la population se situe entre ces deux extrêmes.

L’idée décrite ici a été reprise sous forme de motion par des conseillers aux Etats PLR, PDC et UDC. On souhaite qu’elle soit traitée de la manière la plus objective, sans a priori collectiviste, et en gardant à l’esprit que la croissance démesurée des dépenses sociales publiques nous lance contre le mur.

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