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Oui aux nouveaux avions de combat

Jean-François Pasche
La Nation n° 2154 31 juillet 2020

Le 27 septembre, nous voterons sur l’acquisition de nouveaux avions de combat pour nos forces aériennes. Dans un précédent article, nous avions insisté sur la responsabilité de tout pays d’assurer la sécurité de son ciel. L’OTAN ne nous protège pas, car nous n’en sommes pas membre. Et quand bien même nous en serions, sans parler des problèmes que cela poserait par rapport à la stature internationale de la Suisse, nous nous verrions imposer une participation à un effort de défense commun, financièrement et par l’achat de matériel – des avions de combat par exemple. Assurément, l’OTAN n’accepterait pas qu’un pays riche comme le nôtre n’apporte pas une contribution substantielle à l’effort commun.

Cependant, le fiasco de l’affaire Gripen, dont l’achat d’une vingtaine d’exemplaires avait été refusé par le peuple suisse en 2014, est encore bien présent dans les mémoires. Mais cette fois le Conseil fédéral a mis en place une procédure pour éviter au moins un écueil, celui du choix du type d’appareil par le peuple suisse. Avec le Gripen, nombre de citoyens avaient mis en doute non pas le fait que l’armée avait besoin de nouveaux avions, mais le modèle d’avion en lui-même, réputé moins performant que ses concurrents. Il faut dire que le monde de l’aviation militaire est un panier de crabes, sujet aux manigances en tous genres, de la part des constructeurs mais aussi des Etats, dont il est dans l’intérêt stratégique d’entretenir les compétences nationales en matière d’aéronautique militaire.

Pour contrecarrer au moins en partie l’influence des lobbys des différents constructeurs – Dassault, Eurofighter, Lockheed Martin et Boeing – nous ne voterons pas sur le type d’appareil, qui sera choisi par le Conseil fédéral dans les prochains mois, mais sur l’enveloppe de 6 milliards de francs destinée à l’acquisition de l’heureux élu.

Eclaircissons immédiatement un point: ces milliards seront prélevés sur le budget ordinaire de l’armée. En cas de refus, ils seront alloués à d’autres dépenses militaires. En fait, si l’on vote, c’est parce que l’achat d’avions de combat est historiquement fort émotionnel pour les Suisses. C’est toujours l’occasion pour la gauche de faire croire que les milliards en cause seraient mieux dépensés autrement. Mais pour ce qui est de tout le reste du matériel militaire, jamais il n’est question d’un vote populaire. Par prudence, le Conseil fédéral a pris la décision de la somme maximale allouée aux nouveaux avions ainsi que de la proportion des affaires compensatoires par le biais d’un arrêté fédéral de planification soumis au référendum populaire1. Ainsi, il a déterminé lui-même par quel moyen la gauche allait inévitablement tenter de faire barrage à son projet. Et la chose n’a pas manqué, le référendum «contre l’achat de nouveaux avions de combat de luxe», lancé par le GSsA, le PS et les Verts, a été déposé le 17 juin. La presse dominicale se fait l’écho de ce qui semble être le principal argument contre les avions: leur prix.

Pour se donner plus de crédibilité, la gauche met en avant les coûts d’exploitation des appareils, qu’elle chiffre à 24 milliards sur toute la durée d’exploitation des avions. On ne sait trop sur quelle base elle a fait ses calculs, mais, dans tous les cas, ces coûts seront assumés par le budget ordinaire de l’armée. Nous le répétons, avec cette votation il ne s’agit pas de donner plus d’argent à l’armée, mais de permettre au peuple suisse de s’exprimer sur un sujet sensible et d’éviter ainsi un blocage politique.

Les quatre avions en lice, le Rafale français, le Typhoon d’Eurofighter (sorte d’Airbus de l’aviation militaire), le F/A-18 Super Hornet et le F-35 Lightning II des américains Boeing et Lockheed Martin respectivement, sont de bons appareils, parmi les plus performants du marché. Ils devront être capables de remplir un panel de missions. La police aérienne en est une. Il y a aussi des capacités de soutien aérien des troupes au sol, perdues depuis la mise hors service des derniers Hunter en 1994, que notre armée aura l’occasion de recouvrer. Enfin, depuis le retrait du Mirage IIIRS en 2003, la Suisse a perdu un outil important de reconnaissance aérienne. Là encore, il est prévu de pallier ce manque.

Les socialistes ont fait la proposition en novembre dernier de se contenter d’avions d’entraînement à réaction sur lesquels on grefferait quelque armement. Plusieurs pays recourent à cette méthode afin d’alléger la charge de leurs jets de combat, comme les Etats-Unis ou Israël. Mais en aucun cas ces appareils ne sont capables de remplacer complètement des avions du type que la Suisse compte acheter. Ils peuvent tout au plus assumer des missions d’attaque au sol dans des contextes de domination aérienne assurée par des avions comparables au Rafale ou au F/A 18 par exemple. Ils sont là en plus, non pas en remplacement. Ils sont dans tous les cas incapables de remplir des missions de police aérienne. Ils sont en effet incapables d’être prêts en 15 minutes au décollage en cas d’alerte. En plus, ils ne possèdent pas la post-combustion, donc ne peuvent intercepter suffisamment rapidement des appareils volant en haute altitude. C’est simple, ils ne sont pas prévus pour ce type d’engagement. La police municipale de Lausanne équipe une partie de ses agents avec des vélos électriques. C’est probablement très pratique dans certains contextes, un peu moins pour intervenir rapidement sur les lieux d’un incident loin du centre-ville.

En votant OUI le 27 septembre, non seulement les Suisses permettront le renouvellement des moyens de police aérienne, composante essentielle de notre crédibilité internationale, mais aussi à notre armée de récupérer des capacités opérationnelles perdues au cours des trois dernières décennies.

Notes:

1  Arrêté de planification approuvé par le Conseil fédéral le 26 juin 2019 et adopté le 20 décembre 2019 par le Parlement fédéral.

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