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Le bio tue, le nucléaire vivifie - Systèmes politiques comparés de la Confédération suisse et de la République de Biélorussie

Le Coin du Ronchon
La Nation n° 1916 3 juin 2011
La présente rubrique pourrait tout à fait traiter des thèmes qui passionnent les foules, comme par exemple l’impact du Fonds monétaire international sur l’hôtellerie new-yorkaise, la volonté des fonctionnaires fédéraux alémaniques de «mettre au pas les Welsches» en limitant la vitesse à 60 km/h sur l’autoroute de contournement de Lausanne, ou encore la menace des melons explosifs de Chine et des concombres tueurs d’Espagne. La virulence vindicative de ces derniers, selon les explications scientifiques les plus récentes, serait liée à leur qualité de «légumes bio» – produits que l’on devrait proscrire afin de vivre plus longtemps et en meilleure santé. A quand une mise en garde en gros caractères sur les emballages, où l’on expliquerait aux consommateurs qu’ils courent un plus grand risque à manger des melons et des concombres qu’à fumer des cigarettes assis sur un tas d’amiante dans un parc public de Fukushima?

Nonobstant l’intérêt de ces sujets, nous nous en tiendrons aujourd’hui à celui, moins populaire et plus philosophique, qui était prévu de longue date et que l’on pourrait résumer ainsi: La démocratie naît bonne, c’est l’argent qui la corrompt. C’est là l’un des grands axes de réflexion du socialisme, qui amène les politiciens de gauche à dénoncer régulièrement les moyens financiers «indécents» de leurs adversaires. Ces derniers, assis dans de luxueux bureaux, les pieds sur la table, coiffés d’un haut-de-forme et fumant de gros cigares, réussissent, à coups de «millions», à tromper les citoyens; on dit alors que la gauche a perdu à cause de l’argent de la droite. Parfois, et même assez souvent, ça ne marche pas; on dit alors que la gauche a gagné malgré l’argent de la droite.

On comprend par là – mais on le savait déjà – que les socialistes n’aiment pas les riches. On croit parfois qu’ils aiment les pauvres, et cette illusion semble valablement étayée par le fait que, dans un monde correspondant à leur idéal, il n’y aurait effectivement plus que des pauvres. Mais en réalité, le socialisme consiste davantage à haïr les riches qu’à aimer les pauvres, et donc à prendre l’argent des riches plutôt qu’à le donner aux pauvres – car sinon ces derniers deviendraient riches.

Si nous sommes amenés à disserter aujourd’hui sur ce thème, c’est précisément à cause de l’énergie nucléaire. En effet, la décision de Mme Leuthard de «sortir du nucléaire» (c’est-à-dire de laisser ses successeurs et les générations futures se débrouiller avec les problèmes d’approvisionnement en électricité, lesquels semblent à ses yeux beaucoup moins importants que les élections fédérales de cet automne) a été la conséquence d’une campagne massive de la télévision d’Etat du bout du lac, dont les journalistes ont accompagné pendant une bonne semaine les militants antinucléaires, retransmettant longuement leurs manifestations lors du journal du soir et relayant leurs revendications. Sous d’autres cieux, on aurait soupçonné une affaire de corruption; on aurait imaginé le présentateur du téléjournal recevant discrètement une volumineuse enveloppe des mains du président du parti socialiste… En Suisse romande, cela n’est pas nécessaire puisque les journalistes sont nativement de gauche. Cela fait une économie considérable pour ceux qui veulent les acheter.

Cela étant, les journalistes des médias publics ne vivent pas que de luttes sociales et d’eau fraîche. Ils doivent aussi gagner leur vie – et même bien la gagner puisqu’ils ont, eux, un droit moral à disposer d’un revenu confortable. Pour cela, c’est nous, simples pékins, qui les payons – bien entendu sans pouvoir prétendre à ce qu’ils nous en soient reconnaissants et représentent équitablement nos opinions. Avant même qu’elles ne soient écrites, les lignes qui précèdent ont fait bondir un lecteur: le sujet ne l’intéresse pas étant donné qu’il ne possède pas de télévision et ne paie donc pas la redevance. Grossière erreur, hélas, car, d’ici peu, ladite redevance sera étendue à tous les ménages. Nous sommes donc bel et bien dans un système où les citoyens sont obligés de verser ce qui s’apparente de plus en plus à une cotisation à peine déguisée, non déductible fiscalement, à l’un des principaux partis au pouvoir, afin de financer ses campagnes de propagande. Selon le site internet de Billag, cela représente 1,3 milliard de francs par année; à ce niveau-là, Blocher et l’UDC sont largués!

On peut dès lors se demander si les citoyens sont vraiment mieux traités dans le système politique helvétique que dans la Biélorussie de M. Alexandre Loukachenko – sachant accessoirement que, dans ces lointaines plaines slaves, on ne se traîne pas à 60 km/h sur les autoroutes, les légumes ne tuent personne et la nature se porte comme un charme, particulièrement au sud, tout près de Tchernobyl, où, selon un journaliste allemand qui a parcouru ce pays à pied, la végétation est luxuriante et les animaux sauvages prolifèrent mieux que jamais.

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