Marguerite verte et autres vacheries

La Suisse, c’est l’argent, les vaches et la démocratie directe. Les trois se rejoignent parfois. Alors que le peuple et les cantons s’apprêtent à voter sur l’«initiative vache à lait», qui demande que l’argent de la route revienne à la route, un comité de paysans écolos-alternatifs vient de déposer une «initiative pour les vaches à cornes», qui revendique des subventions fédérales pour lesdits animaux. Des cornes d’abondance, donc.

Alors quoi? Vache à lait qui en a marre de payer pour les autres, ou vaches à cornes qui veulent faire payer les autres? La Nation vote OUI à la première, c’est assez rare pour être signalé. (Et ce qui est rare est cher, à juste titre. Merci de soutenir La Nation !) Quant à la thématique du «revenu de base inconditionnel» pour bovidés cornus, nous pencherions plutôt pour une solution fédéraliste: qu’y a-t-il de commun, nous vous le demandons, entre une vache fribourgeoise, d’Hérens ou du Simmental? Il y en a des brunes, des tachetées, des noires et blanches et des grises, et cette multiculturalité qui enrichit le quotidien des Helvètes (surtout en matières grasses) doit être préservée. Plaidons donc pour le droit à l’autodétermination: chaque canton doit pouvoir décider s’il veut des vaches avec ou sans cornes, avec cornes et avec subventions, ou avec cornes sans subventions. Seul cas délicat: Uri, ou un renoncement aux cornes nécessiterait une retouche de l’écusson par un bon héraldiste (on en trouve à des prix très compétitifs, mais non subventionnés par la Confédération).

Il n’en reste pas moins que, taxée ou subventionnée, la vache pollue l’air pur de nos montagnes. La vraie révolution interviendra donc lorsqu’on aura inventé une race bovine sans émissions de méthane après digestion.

Cette vache «100% durable» (verte, peut-être?) – appelons-la Marguerite – deviendra une icône de la mobilité individuelle éco-responsable, et à ce titre elle sera exonérée de la taxe CO₂ sans qu’il faille lancer une initiative populaire pour cela. Elle en rira.