Identification
Veuillez vous identifier

Mot de passe oublié?
Rechercher


Recherche avancée

Statistiques

Jean-François Cavin
La Nation n° 2054 30 septembre 2016

La statistique, on le sait, est la forme officielle du mensonge. Mais c’est aussi l’aliment indispensable de tout observateur de l’économie et de la société, qui voudrait donc croire à leur sérieux.

Or comment s’en convaincre lorsqu’on lit dans la presse du mois passé que la Suisse compte plus de 300’000 chats errants? La SPA lance-t-elle des volontaires aux trousses de tous les minets sans collier pour leur coller une puce? On aurait déjà peine à croire à la véracité d’un recensement des petits félins domestiques; alors les chats errants…

C’est comme les travailleurs clandestins. Certains chercheurs fantaisistes nous en révèlent périodiquement le nombre, avec une étonnante précision. Mais comment identifier des individus par définition inconnus de nos services?

Statistique ou intox? La drogue inspire aussi à certains des chiffres d’une exactitude… stupéfiante. Le municipal lausannois Oscar Tosato, qui s’attache à légaliser la fumette de chanvre, déclare: A Lausanne, 3,1 kg de cannabis sont consommés chaque jour (24 heures du 8 septembre). Vous avez bien lu: 3,1 kg, pas trois ou trois et demi. On croyait que la police avait de la peine à traquer les pratiques illégales. Mais non, les agents savent tout et enregistrent au gramme près la denrée qui échappe à leur contrôle coercitif.

Les besoins des campagnes référendaires enflamment aussi l’imagination numérisante des politiques. Ainsi M. Daniel Brélaz, connu pour son art de jongler avec les chiffres, a tenté de peindre en rose et vert l’avenir d’une Suisse appelée à limiter par l’ascèse son «empreinte écologique»; cela en montrant que cet exercice d’austérité offrait une chance de développement: La Suisse compte déjà 530’000 emplois dans les technologies propres et ce chiffre ne cessera de monter en cas d’acceptation de l’initiative. L’Office fédéral de la statistique, lui, dans une publication un peu ancienne il est vrai, affirme qu’il est impossible de dénombrer précisément les emplois liés à la protection de l’environnement; il ajoute que le 80% environ de ces emplois s’exercent vraisemblablement dans la voirie, l’assainissement et la gestion des déchets. Technologie?

Plutôt que de spéculer sur des emplois incertains, M. Brélaz ferait peut-être mieux de compter les chats errants: il en a déjà un sur sa cravate.

Vous avez de la chance, cet article est en accès public. Mais La Nation a besoin d'abonnés, n'hésitez pas à remplir le formulaire ci-dessous.
*


 
  *        
*
*
*
*
*
*
* champs obligatoires
Au sommaire de cette même édition de La Nation: