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La politique des transports en Suisse

Antoine Rochat
La Nation n° 1891 18 juin 2010
La collection jaune des «Etudes & Enquêtes» du Centre Patronal vient de s’enrichir d’un ouvrage de M. Patrick Eperon, intitulé Politique des transports: l’heure des métropoles1. Cette brochure est l’occasion de faire le point sur la politique des transports en Suisse et dans le Canton de Vaud.

Présentation de l’ouvrage

Secrétaire patronal, M. Eperon est un spécialiste reconnu des questions de transports. Son ouvrage est bien documenté, agrémenté de plusieurs annexes (cartes, tableaux, glossaire, etc.). On peut le résumer en deux thèses principales:

Après avoir soutenu massivement l’axe ferroviaire nord-sud (tunnels de base du Gothard et du Lötschberg), les autorités fédérales doivent maintenant se soucier de l’axe est-ouest, dans une perspective de complémentarité entre le rail et la route.

L’axe est-ouest permet de relier et de faire vivre deux, voire trois métropoles helvétiques: Zurich, le lac Léman (Genève – Lausanne – Montreux), sans oublier Bâle. Autrement dit, le Plateau suisse abrite le plus grand nombre d’habitants du pays et ses principaux axes de transports sont surchargés. C’est donc là – et non plus dans le sens nord-sud – qu’il faut mettre l’accent dans le domaine des transports.

Politique fédérale

Après avoir été conduite longtemps dans une perspective d’opposition entre le rail et la route, la politique fédérale semble s’orienter désormais vers davantage de complémentarité. L’élimination des goulets d’étranglement, voire le développement du réseau autoroutier, ne sont plus considérés comme tabous. Le trafic d’agglomération est appréhendé sous l’angle des transports publics, mais aussi du trafic privé.

Les experts fédéraux admettent que la croissance de la population engendre inévitablement des besoins accrus en matière de transports. Les statistiques montrent en outre que la mobilité des loisirs est plus importante que celle liée au monde du travail.

Sur le plan financier, M. Eperon relève que les usagers de la route contribuent bien davantage que ceux du rail à la couverture des coûts. Il admet toutefois que le développement des infrastructures routières nécessitera des recettes nouvelles.

Politique cantonale

L’acceptation par le peuple vaudois du projet de métro m2 (Ouchy – Epalinges) et son entrée en service ont contribué à une nette augmentation de la fréquentation des transports publics dans la région lausannoise. Les trains entre Lausanne et Genève, mais aussi dans une moindre mesure ceux entre Lausanne et Montreux, sont bondés aux heures de pointe. La situation n’est pas différente sur les routes et sur les autoroutes.

Le Conseil d’Etat paraît enfin admettre qu’il faut délier les cordons de la bourse dans le domaine des investissements routiers et ferroviaires. Même M. François Marthaler, le chef écologiste du Département cantonal des infrastructures, se met à parler de complémentarité entre le rail et la route2.

Il faut également saluer l’accord intervenu entre les cantons de Vaud et de Genève, pour soutenir le développement des moyens de transports entre les deux capitales lémaniques.

Notre appréciation

Nous suivons entièrement M. Eperon dans sa réflexion relative aux axes de transports en Suisse. Gouffre à milliards, le tunnel ferroviaire de base du Gothard n’est pas encore en service et il n’empêchera nullement les bouchons autoroutiers sur le même axe. Dans le même temps, plusieurs lignes ferroviaires et autoroutes du Plateau suisse ont d’ores et déjà atteint le seuil de saturation. Sachant le temps nécessaire à la réalisation de grands travaux d’infrastructures, il faut rapidement se mettre au travail3.

Nous sommes nettement moins convaincu par la notion de métropole lémanique. Nous y voyons une construction abstraite, censée faire contrepoids à celle de Zurich, mais qui n’a pour l’heure guère d’existence réelle, ni de réalité politique. Hormis le lac Léman, qu’y a-t-il de commun entre Genève et Montreux?

Dans le domaine financier, nous sommes d’avis que la prudence reste de mise. Les taxes routières contribuent déjà largement aux finances fédérales et les projets de nouvelles ponctions ne manquent pas (taxe incitative climatique, initiative populaire en faveur des transports publics, etc.). De nouvelles taxes à charge de la route ne seront admissibles que si elles servent essentiellement à financer des infrastructures routières.

D’une brochure émanant du Centre Patronal, nous aurions attendu que la perspective fédéraliste en général, et l’intérêt du Canton de Vaud en particulier, soient davantage pris en compte. Nous rejoignons cependant M. Eperon lorsqu’il relève que des transports routiers et ferroviaires sont indispensables au bon fonctionnement de la vie économique du pays.

Conclusions

La politique suisse des transports implique des équilibres délicats: entre le rail et la route; entre l’écologie et l’économie; entre la Confédération et les cantons. Après des années de vaines tentatives dirigistes4, on peut se réjouir du fait que la complémentarité des transports apparaisse enfin dans les discours officiels. Il faut encore qu’elle se concrétise dans la réalité des faits.


NOTES:

1 Patrick Eperon, Politique des transports: l’heure des métropoles, collection Etudes & Enquêtes no 40, Lausanne 2010, disponible auprès du Centre Patronal à Paudex, au prix de fr. 22.–.

2 24 heures du 17 avril 2010.

3 L’importance de l’axe est-ouest est également mise en évidence dans un autre ouvrage récent relatif aux questions de transports: Daniel Mange, Plan Rail 2050, plaidoyer pour la vitesse, collection Le savoir suisse, Lausanne 2010, p. 15.

4 On pense par exemple à la politique coordonnée des transports (PCT), refusée par le peuple et les cantons le 12 juin 1988.

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