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Souveraineté éolienne

Jean-François Cavin
La Nation n° 2204 1er juillet 2022

Le Conseil d’Etat était jusqu’à présent favorable au développement de l’éolien industriel dans la nature vaudoise, de façon guère compréhensible puisque cette énergie, peu productive sous nos cieux moins ventés que la côte atlantique, aléatoire, coûteuse, plus polluante qu’on ne croit (immenses socles en béton, voies d’accès pour poids lourds, terres rares dans le rotor, pales bourrées de balsa prélevé dans les forêts d’Amazonie), défigurerait certains de nos plus beaux paysages. Nous attendions donc avec appréhension sa prise de position sur le projet inconstitutionnel et centralisateur de Mme Sommaruga que notre journal a présenté il y a quelque temps. Cette esquisse de révision de la loi fédérale sur l’énergie, rappelons-le, vise notamment à donner à la Confédération la compétence de fixer l’emplacement des installations importantes et à concentrer la procédure d’autorisation au niveau cantonal en supprimant tout pouvoir de décision des communes. Nous allions par conséquent scruter avec la plus grande attention la réponse gouvernementale.

Nous sommes partiellement rassurés. Le Conseil d’Etat s’oppose à l’introduction d’une «conception fédérale des énergies renouvelables», instrument permettant à la Confédération de désigner les sites des installations importantes. Mais il le fait pour des motifs d’opportunité de politique énergétique plus que par conviction fédéraliste. Et il ajoute qu’à défaut de supprimer cette conception, il faut «au moins aligner les valeurs définissant les projets d’importance à celle fixée pour définir l’intérêt national»; la défense de la souveraineté cantonale est ainsi immédiatement affaiblie.

Le Conseil d’Etat refuse aussi l’obligation de créer une «procédure concentrée» à l’échelon cantonal, supprimant tout pouvoir de décision des communes. Les cantons doivent rester maîtres de l’organisation de leurs procédures. Fort bien. Cela dit, l’avis du gouvernement sur le rôle des communes n’est pas très clair. D’une part, il affirme qu’«il est important de prendre en compte la volonté communale pour les projets concernés» et invoque «le respect de l’autonomie communale». D’autre part, il souhaite que le droit fédéral permette «aux communes concernées et aux cantons de décider au cas par cas si une planification communale ou cantonale doit être privilégiée». Au cas par cas? Et qui décide? Plus loin: «L’investisseur devrait pouvoir choisir librement de suivre une procédure concentrée», notion qui, dans le projet fédéral, exclut la compétence communale. On reste donc sur ses gardes, d’autant plus que le droit vaudois permet à l’Etat de recourir à l’arme d’un plan d’affectation cantonal.

Les récentes décisions des communes touchées par le gigantesque projet de la Grandsonnaz (refus de sept machines à Fontaines, de deux à Bullet sous réserve d’un referendum spontané, report de la décision à Fiez, acceptation seulement à Mauborget) montrent bien que les autorités communales examinent l’utilisation de leur territoire avec vigilance.

Le Conseil d’Etat ne se prononce pas sur la constitutionnalité du projet fédéral, ou plutôt sur son inconstitutionnalité, qui ne fait pas de doute à nos yeux. C’est regrettable, car il n’est pas exclu que Mme Sommaruga persévère, et le viol de la loi fondamentale serait alors un argument de poids.

D’autres voix se sont élevées, ailleurs en Suisse, contre ce projet inadmissible, mais la partie est loin d’être gagnée.

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