Jeux de nains, jeux de vilains

Si vous avez attentivement suivi les petites nouvelles de l’été – en particulier pendant la première semaine d’août où le réchauffement climatique s’est cruellement fait désirer, nous obligeant tous à porter une petite laine – vous n’aurez pas manqué de retenir ce petit scandale qui a secoué le sud de la France: une troupe espagnole de «nains toreros» a présenté un spectacle «comico-taurin», c’est-à-dire une sorte de corrida «sans violence sur l’animal».

Si cette affaire a débordé le microcosme local, c’est que le Parlement espagnol, se fondant sur les directives européennes en matière de discrimination liée au handicap, a décidé ce printemps d’interdire les spectacles mettant en scène des nains. Ceux-ci viennent donc donner leurs représentations en France, où le législateur a été apparemment un peu moins rapide.

Mais ce petit espace de liberté ne saurait durer. Pour la ministre française chargée des personnes handicapées (sic!), «considérer le nanisme comme une source de divertissement pose problème et il est urgent de repenser collectivement cette représentation». Elle est appuyée par la présidente de «l’Association française des personnes de petite taille» qui estime que «ce type de spectacle est contre-productif».

Les nains toreros tentent de défendre leur travail, ils expliquent qu’ils aiment ce qu’ils font, ils contre-attaquent même avec les armes de l’adversaire: Nous priver de notre travail, c’est de la discrimination! Pourquoi devrait-on réserver ces spectacles à des gens de taille ordinaire? Mais ce sera peine perdue. Autant demander à un idéologue soviétique d’écouter les doléances des prolétaires. La ministre française, pleine de condescendance à l’égard de ces individus hauts comme trois pommes qui prétendent faire ce qu’ils veulent, aimer ce qu’ils font et gagner leur vie par eux-mêmes, a déjà laissé entendre qu’il serait préférable que les nains se consacrent à des compétitions sportives. Basketteurs, si vous voulez; mais toreros, c’est non!

Il y a les bonnes minorités et les mauvaises minorités et les nains toreros l’apprennent à leurs dépens. Peut-être qu’avec des nains racisés transgenres, ils auraient une petite chance d’être écoutés?