Identification
Veuillez vous identifier

Mot de passe oublié?
Rechercher


Recherche avancée

Zundel, l’émerveillé

Olivier Klunge
La Nation n° 2244 12 janvier 2024

Maurice Zundel est né à Neuchâtel le 21 janvier 1897. Il étudie à l’abbaye d’Einsiedeln, puis à l’Université de Fribourg où il est ordonné prêtre en 1919. Envoyé à Rome par son évêque, Mgr Besson, il obtient un doctorat en philosophie (L’influence du nominalisme sur la pensée chrétienne), à l’Angelicum en 1927. Peut-être sous l’influence d’une grand-maman et d’un ami protestant, il s’éloigne de l’enseignement thomiste, et est rapidement perçu comme un mystique marginal par ses supérieurs et ses confrères.

Après Rome, son évêque l’envoie à Paris, en Angleterre, puis en Egypte. Dès 1946, il est nommé prêtre auxiliaire à la paroisse du Sacré-Cœur à Lausanne, où il restera jusqu’à sa mort le 10 août 1975. Cette paroisse crée actuellement un espace à son nom au boulevard de Grancy, il se veut un espace d’accueil pour ceux qui passent, de passerelle pour ceux qui s’y arrêteront (expositions et conférences) et de formation pour ceux qui y demeureront (journées et retraites spirituelles). Il abritera aussi les archives de l’abbé.

Le pasteur Virgile Rochat et l’abbé Marc Donzé, qui anime aussi un excellent site mauricezundel.com, ont publié un florilège didactique1 de la réflexion de ce penseur dont le pape Paul VI a dit: «C’est une sorte de génie, avec des fulgurations.»2

On y découvre la grande intuition de Zundel: l’homme ne devient vraiment lui-même qu’en se détachant des déterminismes qui l’enferment, pour entrer dans un chemin de liberté par l’émerveillement, dans l’expérience ressentie devant une œuvre d’art, une musique, les sciences ou la nature.

Cependant Maurice Zundel se différencie des apôtres du développement personnel: «C’est à ce moment-là que jaillit la liberté comme un élan de tout l’être dans le don de soi qui répond à un don qui le sollicite, qui l’appelle et qui l’aimante, en sorte que c’est toujours dans la liberté, dans ce jaillissement tout neuf d’une liberté qui se découvre et qui naît à elle-même, que le vrai Dieu apparaît et atteste sa Présence.»3

Le prêtre du Sacré-Cœur est un mystique qui cherche le dépouillement de soi-même pour laisser entrer toute la plénitude de son Seigneur dans la seule vraie liberté qui est celle du don de soi. Il le dit avec des mots simples et beaux.

Mais il ne s’arrête pas à la contemplation et nous appelle à l’action: «Si [Dieu] n’est pas vivant en nous, si ça ne change rien dans notre vie, si notre vie n’est pas passionnante, magnifique, créatrice, pourquoi est-ce que les autres se mettraient en quête d’un Dieu qui ne change rien à rien?»4

Maurice Zundel, par sa liberté de pensée ancrée dans une foi profonde et vécue, continue à interpeller aujourd’hui. Par exemple, face aux peurs suscitées par l’intelligence artificielle: «L’homme-robot résulte d’un univers-robot; si l’homme est autre chose, ce sera dans un univers que l’homme inventera, que l’homme créera en se créant lui-même.5»

S’émerveiller ouvre un accès aisé, et pourtant stimulant et riche, à la pensée de ce prêtre qui a marqué la vie vaudoise en rappelant «toute la nouveauté de l’Evangile: Jésus a pris la vie, il l’a glorifiée, il l’a transfigurée, il lui a donné une dimension infinie, afin que nous puissions la vivre avec un émerveillement continuel et une passion infinie.6»

Notes:

1   Maurice Zundel, S’Emerveiller, Cabédita, 93 p.

2   Op.cit., p. 7.

3   Op.cit., p. 47

4   Po. Cit. p. 83

5   Tiré d’une conférence de 1966, op.cit., p. 84.

6   Op cit., p. 58.

Vous avez de la chance, cet article est en accès public. Mais La Nation a besoin d'abonnés, n'hésitez pas à remplir le formulaire ci-dessous.
*


 
  *        
*
*
*
*
*
*
* champs obligatoires
Au sommaire de cette même édition de La Nation: