Le Major Davel: derniers feux

2023 a été marqué par l’Année Davel, pour célébrer les trois cents ans de son procès et de son exécution. Parmi les multiples manifestations qui ont été organisées pour l’événement, établissons une liste sélective:

– à l’Opéra de Lausanne, le spectacle de René Zahnd, musique de Christian Favre;

– à Cully en été, la pièce «Le Mystère de Davel».

Si les spectacles laissent de bons souvenirs, les publications restent et on peut les consulter à loisir:

– Davel, héros vaudois, de Corinne Chuard dans la coll. Presto des Editions Infolio, l’essentiel pour gens pressés (64 pages);

– Davel, Des brumes de l’oubli aux feux de l’opéra, d’Antonin Scherrer, Ed. Favre: le héros dans les arts et les spectacles de ces deux derniers siècles;

– Le numéro spécial de la revue Passé simple, N^o 77, sept. 2022: un kaléidoscope très réussi;

– Le Major Davel, Naissance du premier patriote vaudois, de Gilbert Coutaz, Ed. Château & Attinger, avec toutes les étapes de son interprétation;

– Le Major Davel à travers le temps, Trois cents ans d’histoire, sous la direction d’Olivier Meuwly, dernier numéro publié par la Bibliothèque historique vaudoise. C’est cet ouvrage majeur que nous allons présenter.

On pense que tout a été dit et publié sur «notre héros national», précurseur de l’Indépendance vaudoise, et pourtant! Même si «aucun fait nouveau, aucun document inédit n’ont été découverts», comme le déclare Olivier Meuwly dans son avant-propos, Davel continue de fournir des occasions de recherches aux historiens, et le fort volume de la BHV en est la preuve tangible. Encore «introuvable», selon Gilbert Coutaz en 2022, une conférence manuscrite d’Antoine Vermeil a réapparu depuis lors. Prononcée en 1825 devant les étudiants de la société de Zofingue, elle marque un jalon important entre les éloges prudents des débuts du XIX^e siècle et l’étude si précise et sensible de Juste Olivier, première biographie de Davel, publiée en 1842 et accessible grâce au site de la Bibliothèque numérique romande.

Mais le volume fournit d’autres études qu’on peut appeler pionnières, surtout sur la première moitié du XVIII^e siècle, encore bien mal connue malgré les nombreuses études existantes. La partie vaudoise des Délices de la Suisse d’Abraham Ruchat (4 volumes publiés en 1714), Morrens et Cully à l’époque de Davel, la société lausannoise, la procédure judiciaire, le notariat, l’engagement militaire de Davel, la première partie du volume apporte des lumières nouvelles sur cette période grâce aux travaux des chercheurs.

La seconde partie se concentre sur la réception du procès et de la condamnation de Davel: comme l’affirme Gilbert Coutaz, «la numérisation de la presse internationale et nationale ainsi que des imprimés anciens a modifié complètement l’audience de l’affaire Davel». Les dates des anniversaires du héros et de ceux du Canton ont donné l’occasion de prononcer des discours et d’écrire des articles qui marquent autant de regards sur notre célèbre patriote. Hommes politiques, pasteurs, écrivains (en l’occurrence Ramuz et Gérard Valbert), peintres… et professeurs d’histoire dans les manuels scolaires, chacun avec les préoccupations de son temps et des circonstances, ont donné à Davel telle orientation, voire tel message à transmettre. L’utilisation de Davel a permis parfois des identifications surprenantes avec des personnalités qui parlaient de lui… et d’elles en même temps.

Vingt et une personnes ont rédigé les divers chapitres de cet important volume, apportant des faits et des vues du plus haut intérêt sur Davel, son temps et sa postérité.