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Bouffons

Le Coin du Ronchon
La Nation n° 1909 25 février 2011
Un gréviste de la faim qui lance une pétition pour protester contre la qualité de la nourriture en prison: la nouvelle est cocasse, au point que même les journalistes se moquent désormais ouvertement de M. Bernard Rappaz, le marchand de drogue multirécidiviste bien connu. Ce dernier préfère donc refuser des mets délicats plutôt qu’une vulgaire tambouille; s’épanchant dans la presse, il se plaint de pâtes trop cuites (Al dente, les pâtes, on vous a dit!), mais aussi de «l’absence d’entrées et de desserts». (Généralement, les prisonniers déplorent davantage l’absence de sorties que l’absence d’entrées.) Les contribuables frémiront donc de pitié en réalisant que le modeste écot qu’ils paient à l’Etat ne permet même pas aux criminels de déguster leur tranche de foie gras et leur parfait Grand Marnier à chaque repas. «Seuls le pain, le café, le beurre et la confiture sont corrects», s’indigne encore le malheureux détenu, inconscient que le beurre et la confiture représentent déjà une notable amélioration du régime carcéral traditionnel. Mais peut-être regrette-t-il simplement les chocolats qu’il mangeait en cachette durant sa grève de la faim?

La fin de l’article publié par Le Matin nous apprend que ces problèmes nutritionnels ne constituent qu’un aspect du vaste combat que mène M. Rappaz pour améliorer son sort: il songe en effet à créer un véritable syndicat de prisonniers apte à négocier, par exemple, la diminution des tarifs téléphoniques. Ou peut-être des coups de fouet. Ou l’augmentation de la durée des vacances ou de la taille des écrans de télévision. On voit par là combien est présent l’esprit du partenariat social: on négocie et on s’arrange entre nous afin que l’Etat ne se mêle pas de nos affaires. (Et l’on compte par conséquent sur M. Rappaz pour s’opposer aux initiatives socialistes qui prônent exactement le contraire.)

La conclusion inattendue de ce qui précède est que le partenariat social s’en trouve réconcilié avec le droit de grève (de la faim), que M. Rappaz peut désormais exercer sans que ses interlocuteurs n’y trouvent rien à redire.

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