Danger sur les finances vaudoises
«Tassement des ressources, croissance des dépenses»: le titre du communiqué du 30 septembre accompagnant le projet de budget 2016 de l’Etat de Vaud semble, pour une fois, non dépourvu de pertinence et d’honnêteté.
Du côté des dépenses, le communiqué parle d’une «croissance contenue» à 2,5%. Remarquons que ceci reste supérieur à la combinaison du taux d’accroissement démographique et de l’indice des prix à la consommation. Même s’il respecte son intention de limiter à terme la croissance de ses dépenses courantes à 2% par an, l’Etat montre une maîtrise toute limitée de ses dépenses. L’augmentation de 111 millions (+ 5,8%; on ne parle même pas de la répercussion automatique de cette augmentation sur les charges communales) dans le domaine social donne même l’impression que rien n’est sous contrôle: en dix ans, ce poste a grossi de 47%. Pareil constat pour la santé, avec 81% de hausse sur la même période! Difficile d’y voir clair du côté des rentrées: le budget prévoit une hausse de 1,45%, mais on se perd dans la présentation officielle qui, pour la première fois, anticipe des écritures de bouclement pour 2015 et compare des lignes comptables que l’on ne retrouve pas à l’identique dans les présentations des comptes et budgets des années antérieures. De cet enfumage de chiffres, on ne retiendra que deux faits. On nous refait d’abord le coup des recettes sous-estimées: les budgets 2015 et 2016 prédisent une hausse cumulée recettes de 5,1% qui, appliquée aux rentrées réelles 2014, devrait porter les espérances 2016 à 10 milliards; un budget à 9,2 milliards, inférieur aux rentrées réelles 2014, n’est donc pas crédible. Ensuite, avec des recettes augmentant moins vite que les dépenses courantes, on amorce à nouveau la spirale de l’endettement.
Côté dette, précisément, son augmentation en période de taux d’intérêt négatifs ne nous dérangerait pas particulièrement si celle-ci était consacrée aux investissements. Or, le budget 2016 prévoit une augmentation de la dette supérieure aux investissements bruts; ceci confirme le soupçon de retour à l'endettement structurel. L’ultime phrase du document officiel de présentation du budget n’est pas pour nous rassurer: «Le Gouvernement veillera en outre à adapter les investissements à l’environnement conjoncturel et à la situation budgétaire de l’Etat.»
L’assainissement des finances et la réduction de la dette vaudoise durant ces douze dernières années ne doit rien à la maîtrise des charges. Celles-ci ont augmenté bien plus vite que la population ou que le coût de la vie. C’est bien la croissance économique exceptionnelle, en ampleur et en durée, dont le Canton a bénéficié qui a permis aux recettes de surcompenser les hausses de charges vaudoises. A l’heure où l’économie tousse un peu et où la réforme de la fiscalité des entreprises prédit une réduction durable des recettes, il est plus que temps pour le Canton de réduire ses coûts de fonctionnement.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- Repères perdus – Editorial, Olivier Delacrétaz
- Un coup dans l’eau – Cédric Cossy
- Dans le jardin de l’enfer – Lars Klawonn
- La mort de Magnard vue par J.-J. Langendorf – Frédéric Monnier
- Un excellent spectacle sur Gilles – Cédric Cossy
- La langue des Suisses allemands – Jean-François Pasche
- Les juges étrangers ne sont pas nos alliés – Pierre-Gabriel Bieri
- L’élite, concept énervant – Jacques Perrin
- Juvenilia CXXIII – Jean-Blaise Rochat
- Crétins au-dessus des Alpes – Le Coin du Ronchon