PC du Général
Les écrits de Barbey sont constamment intéressants sur le plan militaire. Ils témoignent d’un sens tactique affiné qui permet à l’auteur d’exprimer une opinion personnelle sur ce qu’il observe dans le terrain, sans être la voix de son maître. Les contacts que sa fonction lui impose de nouer, tantôt comme représentant ou accompagnant du patron, tantôt pour sa gouverne personnelle, lui permettent de brosser une série de portraits de personnalités militaires où la sensibilité et l’acuité psychologique le disputent à la finesse du trait; mais où la distance respectueuse est maintenue et l’amitié souvent transparaît ou même s’exprime carrément. Le Général, quant à lui, n’est ni peint de pied en cap, ni statufié; pas de panégyrique, ni d’hagiographie; une série de brefs portraits et d’instantanés d’où se dégage finalement l’image que nous connaissons: celle d’un homme constamment droit comme un i, humain, décidé. Un chef.
L’écrivain Barbey a mis au service de sa chronique et de son journal le talent que lui reconnaissaient les milieux littéraires. Ce talent a trouvé à s’exprimer d’une manière inattendue dans un genre qui n’avait plus rien de commun avec le roman qu’appréciait la société parisienne d’avant-guerre. Demeurait certes l’art du portrait et de la notation paysagère. Mais ce talent a introduit dans la chronique militaire un style fait de simplicité, de clarté, d’élégance et de parfaite adéquation à son objet.
Dans une notice introductive, Jean- Jacques Langendorf inscrit Barbey dans une lignée de chroniqueurs qui ont suivi de prestigieux chefs militaires. Il analyse avec sa perspicacité coutumière les liens qui unissent les uns et les autres. Il conclut: «Guisan aura été une des chances de Barbey et Barbey une des chances du Général» et termine sur une note d’humour en imaginant Charles Ferdinand Ramuz au côté du général Wille.
En 1975, la Société Vaudoise des Officiers et l’Association Semper Fidelis avaient publié aux Editions Ovaphil un choix de textes et de documents intitulé Ecrivains militaires vaudois. Le dernier texte présenté était l’hommage rendu par Bernard Barbey à son chef en 1954, sous le titre «Les lauriers verts du Général», cinq pages denses qu’il eût fallu ajouter aux deux oeuvres republiées. Elles constituent la peinture de pied en cap qu’il n’était pas dans le propos de Barbey d’insérer dans le journal lui-même. Elles sont incontestablement les meilleures qu’on puisse lire en cette fin de commémoration.
Bernard Barbey est né à Montcherand en 1900. Il est mort à Paris en 1970, dix ans après le Général. Sa tombe est à Valeyres-sous-Rances, dans le petit cimetière familial, au pied de l’église paroissiale, à deux pas des sépultures d’Alphonse Morel et de Marcel Regamey.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- L’UDC et nous – Editorial, Olivier Delacrétaz
- Un nouveau martyr – Revue de presse, Ernest Jomini
- La Carte et le territoire de Michel Houellebecq – La page littéraire, Laurence Benoit
- «Efina» de Noëlle Revaz – La page littéraire, Vincent Hort
- NON au service universel – Antoine Rochat
- L’armée Suisse est là pour se battre – Ernest Jomini
- La paille et la poutre – Revue de presse, Philippe Ramelet
- Mieux ici que mal ailleurs – Revue de presse, Philippe Ramelet
- Un rappel nécessaire – Revue de presse, Ernest Jomini
- Nuit, froid… et course à pied! – Julien Le Fort
- Va et ne pêche plus – Le Coin du Ronchon