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Actualités  |  Mardi 20 septembre 2016

Un cas d'école au conseil d'Etat

Un homme d'Etat, en toute fin de carrière, prétendait percevoir «comme un doux piétinement». Pour Mme Lyon, c'est elle-même qui se fait piétiner, et durement. La presse écrite et numérique se lâche. Une lettre ouverte, signée de trente enseignants, dénonce à la fois son refus absolu de dialoguer et le ratage tous azimuts de la LEO, sa réforme scolaire: «Destruction du rôle de maître de classe, complexité administrative extraordinaire de l'organisation, mode d'enseignement inadapté aux plus faibles, baisse dramatique des niveaux d'enseignement dans plusieurs branches.»

Les candidates (car «on» a déjà décidé que le prochain chef du DFJC serait une femme, et une socialiste) à la succession de Mme Lyon ont fait discrètement connaître leur intérêt pour le poste. Les Jeunes socialistes, trépignant devant un ascenseur électoral trop longtemps bloqué, annoncent qu'ils ne voteront pas la dérogation demandée par Mme Lyon et M. Maillard pour se présenter à une troisième élection.

Pas besoin d'être un obsédé du complot pour se poser quelques questions face à des attaques aussi unanimes, simultanées et arrivant à un moment aussi stratégique: qui a fait quel pacte avec qui?

Mme Lyon est «murée dans ses certitudes». Soit. Mais pour ce qui est du refus de dialoguer, elle ne fait que perpétuer une tradition aussi ancienne que son Département. Le soussigné était encore jeune qu'on parlait déjà de la «kremlinologie» de l'Instruction publique. Le chef était alors un radical à l'ancienne, et malheur à l'enseignant qui manifestait publiquement une divergence! Un maître secondaire, rédacteur à La Nation, fut convoqué trois fois, par trois chefs  du Département successifs, pour incorrection idéologique. Cela n'excuse pas Mme Lyon, mais les médias devraient éviter de faire comme si l'aveuglement obstiné et la surdité méthodique du Département étaient des scoops.

Mme Lyon sera débarquée, puisque tout le monde, à part elle, le désire. Au fond peu importe. La seule question est de savoir si le nouveau chef imitera ou non ses prédécesseurs. Ceux-ci, depuis les années 1970, et quelle que soit leur idéologie, se sont tous contentés de couvrir, de loin, une réforme qui avançait très bien sans eux, et toujours dans la même direction: unification de la formation des enseignants, des programmes, des méthodes et des manuels – sournoise préparation de la population à l'école unique –, allongement de la durée de la scolarité, éradication des humanités greco-latines, distribution toujours plus généreuse de baccalauréats toujours plus légers et mise au pas des contestataires.

Seul le candidat à la succession qui, socialiste ou pas, femme ou pas, s'engagerait à renverser la vapeur justifierait qu'on se dérange pour l'élire.

(Olivier Delacrétaz, 24 heures, 20 septembre 2016)