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Et l’homme devint femme

Jacques Perrin
La Nation n° 2018 15 mai 2015

Or Dieu dit : « Que la lumière soit faite, et la lumière fut faite. » Au troisième verset de Genèse 1, Dieu exerce sa toute-puissance. Il lui suffit de nommer une chose pour la faire exister. Depuis toujours, l’homme cherche à s’attribuer ce pouvoir, en vain. Bien qu’il soit juste capable de voiler la réalité par des artifices rhétoriques, il s’obstine à s’enivrer de la magie du verbe.

Libération du 19 mars 2015 nous apprend par la plume de Michael Cunningham qu’un conseiller municipal new yorkais se bat pour que sa ville soit la première au monde à donner à ses citoyens le droit de choisir son genre. On pourrait par exemple naître homme biologique et se déclarer femme à l’état civil sans qu’il soit besoin de s’infliger un traitement hormonal puis une opération visant à transformer les organes sexuels.

On ne change pas de sexe. On ne peut pas renaître avec une autre dotation chromosomique. Certains hommes qui se sentent femme au plus profond d’eux-mêmes (ou l’inverse) l’ont compris. Avec les hormones et les opérations, on ne change que d’apparence. Aussi ces personnes s’imaginent-elles, pour soulager leur souffrance, qu’il leur suffit de se déclarer homme ou femme pour l’être, en dépit de l’image qu’elles offrent au public. Cunningham conclut son article en rapportant la réponse d’une amie enceinte à qui il a demandé si elle connaît déjà le sexe de son futur enfant. Tu sais, dit-elle, on ne le saura pas vraiment avant ses dix-huit ans. Ravi de cette déclaration, Cunningham lève son verre au meilleur des mondes.…

Prétendre gouverner l’univers par les mots n’est pas l’apanage des libertaires sexuels. Certains médiatiques adorent s’en donner l’illusion. Quand il est question d’un attentat suicide ou d’une dispute conjugale qui tourne mal, et que les membres d’une certaine communauté sont impliqués dans ces affaires, on nous dit par exemple que le Danois Karim s’est récemment « radicalisé » (« ce n’est pas le Karim que nous avons connu », affirment les habitants du « quartier populaire » de la capitale danoise où Karim résidait). Quant à l’Alsacien Ibrahim, on apprend que sa femme portait la burqa et qu’il est lié à un imam de tendance « dure ».

Karim n’est pas danois, ni Ibrahim alsacien, mais dans la société multiculturelle, il va de soi que tout individu devient citoyen du pays où il s’avise de s’installer, un citoyen de papier certes, comme on l’a justement dit, quoique le passeport ne soit pas nécessaire. On a bien le droit d’être danois ou alsacien si on le désire, même sans papiers…

L’inflation du langage épicène est une autre manière de forcer la réalité à se plier à l’idéologie. Ainsi un journaliste sportif, voulant prouver qu’il est à la pointe d’un combat « sociétal », nomme-t-il les membres de l’équipe suisse féminine de curling, vainqueurs des championnats du monde 2015, les dignes successeuses de celles de 2014, 2012, 1983 et 1979, qui ont remporté la même compétition ces années-là.

Veut-on que les femmes soient enfin en tous points les égales des hommes ? Faut-il qu’un Tunisien devienne tout à coup suédois ? Un homme doit-il se transformer en femme ? On prononce les mots magiques et le tour est joué.

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