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L’impôt anticipé est-il rétrograde?

Olivier Klunge
La Nation n° 2205 15 juillet 2022

Le 25 septembre prochain, nous voterons sur la suppression de l’impôt anticipé et du droit de timbre de négociation sur les obligations émises en Suisse.

L’impôt anticipé

L’impôt anticipé, c’est la déduction de 35% que votre banque applique sur le versement des intérêts qui vous sont dus et que vous pouvez ensuite déduire dans votre déclaration d’impôts. Il s’agit d’une forme d’impôt à la source, versé par la personne payant une prestation directement au fisc pour le compte du contribuable. Cet impôt est le pendant du secret bancaire. Il assure à l’Etat que, même si le contribuable omet de déclarer un avoir, les revenus seront taxés forfaitairement. On peut parler «d’effet protecteur pour le fisc».

L’impôt anticipé ne touche pas que les intérêts des comptes bancaires, mais également ceux des dividendes et des intérêts obligataires versés par des sociétés ou des emprunteurs publics. Dans le cas des obligations, l’effet protecteur pour le fisc ne concerne pas vraiment les contribuables suisses, puisque l’emprunteur va déduire de ses revenus imposables les intérêts versés, permettant au trésor public un contrôle par comparaison. Pour les investisseurs étrangers, l’impôt anticipé permet en revanche d’assurer qu’ils déclarent leurs revenus de source suisse à leur fisc étranger en vue de récupérer l’impôt anticipé prélevé en Suisse.

Avec l’introduction de l’échange automatique d’informations entre autorités fiscales, ce but protecteur a perdu de son sens. La procédure de perception et de remboursement de l’impôt anticipé reste cependant complexe et engendre des coûts non négligeables tant pour les émetteurs que les investisseurs. Comme la plupart des autres pays ne connaissent pas cet impôt, les entreprises suisses, pour améliorer l’efficience de leurs emprunts, vont sur les marchés étrangers pour émettre leurs obligations. Le marché obligataire du Luxembourg est 190 fois plus important que celui de la Suisse… Ce sont donc des places de travail que l’économie suisse offre aux places financières concurrentes.

Le droit de timbre de négociation

Le droit de timbre de négociation est un impôt perçu sur le montant des transactions effectuées sur ces mêmes obligations. Il date de l’époque où l’on pouvait timbrer les billets à ordre, il est inconnu chez nos voisins et, comme pour l’impôt anticipé, il suffit pour une entreprise suisse de localiser la transaction au Luxembourg plutôt qu’en Suisse pour éviter cette charge fiscale.

Nous sommes favorables au maintien du secret bancaire, qui respecte la sphère privée et la confiance entre Etat et citoyen. L’impôt anticipé sur les intérêts des dépôts bancaires est le pendant de cette responsabilité laissée au contribuable. Le 25 septembre, il n’est pas question de remettre cet élément en cause, ni d’ailleurs l’impôt anticipé sur les dividendes, qui restera.

L’impôt anticipé sur les obligations peut être aisément évité par les entreprises suisses en choisissant un for étranger pour leurs emprunts obligataires. Il est donc raisonnable d’abolir cet impôt, comme le droit de timbre de négociation, qui sont responsables de l’expatriation de ce marché, alors que nous avons les compétences en Suisse pour développer des obligations également pour des entreprises étrangères.

Nous voterons OUI à cette réforme modeste et raisonnable de notre fiscalité.

Un plus pour les finances cantonales et communales

Les entreprises peuvent aisément choisir le Luxembourg comme juridiction d’emprunt. Ainsi, les principaux emprunts helvétiques soumis à l’impôt anticipé sont ceux des collectivités publiques, qui doivent offrir un intérêt un peu plus élevé aux investisseurs pour compenser le coût de perception et de remboursement de cet impôt. Si la Confédération s’y retrouve en encaissant l’impôt, ce n’est pas le cas des cantons et des villes qui émettent des obligations. Un effet secondaire de la réforme soumise au referendum sera de diminuer les coûts de financement des dettes cantonales et communales. Notre esprit fédéraliste ne peut que saluer une réforme favorable aux cantons au détriment d’un impôt fédéral!

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