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Actualités  |  Mardi 7 juin 2022

Boris Johnson assis, le prince William à cheval

Le 2 juin 2022, Son Altesse Royale le prince William, duc de Cambridge, comte de Strathearn, baron Carrickfergus, chevalier des ordres de la Jarretière et du Chardon et colonel des Irish Guards, campé sur un cheval noir, inspecte son régiment.

Chaque année, l’un des régiments d’élite en charge de la garde royale prend son drapeau et salue son souverain. En 2022, l’événement est exceptionnellement symbolique: Elizabeth fête le septantième anniversaire de son couronnement.

Mille cinq cents gardes du palais, bonnet d’ours et tunique rouge, certains portant leurs médailles d’Afghanistan, évoluent au son de la fanfare et des cornemuses. Autour du terrain d’exercice, le public s’entasse sur des gradins.

Reconnaissable à sa tignasse blonde, y est assis Boris Johnson. Il peine à se concentrer sur les ordres des officiers de Sa Majesté. Il vient d’apprendre, ou peut-être le pressent-il, qu’il affrontera lundi soir un vote de défiance à la Chambre des Communes. Le lendemain, les Londoniens le hueront devant la cathédrale Saint-Paul.

Des députés de son propre camp veulent sa peau. Les plus vertueux ne lui pardonnent pas ses «fêtes sauvages» de Downing Street, en plein confinement. Les plus ambitieux rêvent de prendre sa place. Depuis quelques semaines, Johnson martèle les appels à fournir encore plus d’armes à l’Ukraine. Son bellicisme lui sert-il à redorer son blason? L’équilibre du monde tient parfois à un fil.

Mais ce 2 juin, quel que soit le résultat du vote de lundi, Boris Johnson est déjà peu de chose. Il est, depuis Winston Churchill qu’il admire tant, le quatorzième premier ministre d’Elizabeth II. C’est à la fois tout et rien face à la longévité de cette femme qui a tant vu, des bombardements de 1940 au Covid, et tant écouté. Chaque semaine depuis septante ans, elle reçoit son premier ministre en audience, sans qu’on ne sache jamais ce qu’elle lui dit.

L’unité et la continuité du royaume

Parce que l’influence politique de la reine n’est pas immédiate, certains concluent trop vite à l’inutilité de la monarchie. Ces personnes n’ont rien compris. Par ses encouragements et ses mises en garde personnelles, mais surtout par sa présence continue aux côtés de son peuple, quels que soient l’air du temps et la majorité aux Communes, la reine Elizabeth incarne à elle seule l’unité et la continuité du Royaume. Son fils Charles reprendra le flambeau. La chaleur suscitée par son discours de samedi est d’excellent augure.

Bien sûr, les difficultés des Britanniques referont surface. Mais la politique va au-delà du taux d’inflation ou des mœurs du premier ministre. Les uniformes rutilants de leurs princes que côtoie leur engagement écologique, les sourires de leur reine, les grimaces des petits héritiers, voilà ce qui donne du pouvoir une image à la fois humaine et pleine de grandeur. De quoi oublier, pour quelques instants, les stériles querelles du parlement.

(Félicien Monnier, 24 heures, 7 juin 2022)