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L’université pour tout comprendre (ou presque) en quatre questions

Charlotte Monnier
La Nation n° 1937 23 mars 2012

Il y a la parenthèse, on est sauvé.

S’il y figurait «ou pas», on serait presque (ou pas) content. Mais on ne l’est pas (du tout). En 2009, l’Unil a publié une brochure à l’intention des écoliers visant à leur expliquer «en 4 leçons» en quoi consiste l’université. Omar Raignée est le premier à se lancer sur le chemin de cette délirante aventure académique en osant poser la question «C’est quoi l’université?» Voilà qui ne saurait mieux formuler la problématique. «C’est un peu comme à l’école… mais c’est aussi très différent.» Et voilà qui y répond avec brio.

«Qu’est-ce qu’on fait à l’université?» C’est la question que Jordi Nateur pose ensuite avec beaucoup de pertinence. Heureusement qu’une psychologue (trop) récemment diplômée et spécialisée dans les jeux vidéo est de taille à lui répondre qu’à l’université, on apprend notamment que «c’est grâce aux jeux que l’on apprend à découvrir des règles en essayant et en faisant des erreurs». Elle l’assure également que «c’est quelque chose de très utile dans la vie réelle, par exemple pour un exercice de maths, ou quand il faut interagir avec les autres». Voilà qui semble avoir sauvé l’EPFL de la désertion, et ce d’autant plus que ladite psychologue termine son commentaire en proférant que «la plupart des joueurs sont quand même raisonnables». Ah, quand même.

«Et après, qu’est-ce que je peux faire comme métier?» Maddie Dji, fan inconditionnelle du rappeur suisse Stress, se soucie de son avenir. Mais rassurez-vous, l’Unil a là encore réponse à tout puisqu’elle offre des «centaines de possibilités» comme, entre autres exemples alléchants, celle d’une place au sein d’un poste de police. En effet, «comme dans la série Les Experts, tu peux étudier les sciences forensiques pour travailler dans la police scientifique». Mais ce n’est pas tout. L’université ouvre encore bien d’autres portes. Elle représenterait même une voie d’accès à l’Eglise puisque «les prêtres ont souvent fait des études de théologie. Cela dépend des cantons et des religions».

L’on se serait bien arrêté sur le non-sens de cette explication si Lana Tassion ne s’était pas empressée de poser une nouvelle et quatrième pertinente question…

«Cool! Je veux aller à l’université!... Heu… Mais comment on fait, au juste?» Si nous avions autant d’audace que les rédacteurs de la brochure en question, nous lui répondrions dans un langage qui se veut proche du sien d’une manière aussi caricaturale que pathétique: «Commence par descendre de ton surf et jette un œil sur le schéma qui figure dans la brochure qu’on vient de te distribuer, fillette. C’est le seul truc perspicace qui y figure.»

A l’issue de ce passage en revue des dites «4 questions» – plus tard (à l’université, par exemple) on aura appris qu’il faut l’écrire en toutes lettres – nous voilà tentés d’en poser une cinquième: «Hé m’sieur! Vous nous prenez pour des crétins?» Parce qu’en toute honnêteté, était-il franchement nécessaire d’imprimer une brochure pour expliquer que «parfois les chercheurs ne savent même pas ce qu’ils vont découvrir»? N’est-ce pas manquer de respect à l’égard d’un écolier que de lui dépeindre le quotidien universitaire sous le jour d’une BD fallacieuse? N’est-ce pas le prendre pour un parfait ignorant que de lui promettre un avenir digne d’une série télévisée?

Voilà quoi qu’il en soit une brochure qui, en plus d’être franchement inutile, est tout à fait (ou presque) insultante. Merci l’Unil! (Ou pas.)

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