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Un ouvrage bienvenu sur le Major Davel

Antoine Rochat
La Nation n° 2216 16 décembre 2022

Comme promis1, nous revenons sur l’ouvrage consacré au Major Davel par M. Gilbert Coutaz, directeur honoraire des Archives cantonales vaudoises2. Nous allons vous présenter ce livre important, en parlant de son introduction, de ses différentes parties, avant de mettre l’accent sur l’une de ses conclusions.

Présentation du livre

L’introduction s’appuie sur trois prolégomènes: M. Coutaz se demande quel Davel pour quelle commémoration. Il relève que Davel n’est ni un mythe, ni un monolithe. Et il met en évidence le fait que l’entreprise du Major est téméraire et paradoxale. L’approche de M. Coutaz est à la fois diachronique et synchronique. Les sources de l’affaire Davel sont connues et fiables; elles sont rappelées, et les principaux ouvrages écrits sur le Major sont évoqués. L’ouvrage est agrémenté de nombreuses citations.

La première partie évoque brièvement la période d’avant 1723, en particulier la conjuration du bourgmestre Isbrand Daux (1588), le contentieux lié aux Etats de Vaud (interdits par Leurs Excellences de Berne dès 1622), ainsi que la réforme du notariat vaudois par les Bernois (1718).

La deuxième partie porte sur l’année 1723 et elle contient un utile rappel des faits: la démarche solitaire du Major, l’argumentaire de son Manifeste, la contestation du Consensus helvétique (profession de foi réformée); le procès, le verdict et l’exécution de Davel. La fin du texte de M. Coutaz mérite la citation:

C’est bien en 1723, à Vidy, que l’indépendance du futur canton de Vaud fut pour la première fois proclamée, mais elle ne pouvait pas être réalisée tant le moment était défavorable. Davel était en avance sur son temps.3

La troisième partie, intitulée «Après 1723», est divisée en six périodes:

– le temps du souvenir dans un climat de censure (1723-1797);

– le temps des succédanés dans un climat identitaire (1798-1830);

– le temps de la réhabilitation dans un climat militant (1831-1850), avec en particulier l’ouvrage fameux de Juste Olivier et le tableau non moins connu de Charles Gleyre;

– le temps de la popularisation dans un climat d’adoption du nouveau héros (1851-1897);

– le temps de la vénération dans un climat de commémorations (1898-1973), avec le bicentenaire de 1923 en point d’orgue, marqué par un «enthousiasme populaire sans précédent»4;

– le temps des incertitudes dans un climat de dénégation (1974-2023), où il est question de l’incendie du tableau de Gleyre ou de celui de la salle Davel à Cully, et de la controverse entre Michel Thévoz et Marianne Mercier-Campiche sur la prétendue culpabilité du peuple vaudois5.

Conclusions du livre

Le chapitre conclusif du livre se présente sous forme d’une question: «Davel, un héros crépusculaire, à transformer ou à réhabiliter?»6

M. Coutaz relève que le phénomène Davel résume à lui seul l’histoire vaudoise, de sa naissance à Morrens jusqu’à la réception du personnage aujourd’hui. Il n’appartient pas à un parti politique, mais il est lié au Canton. Ses derniers mots sur l’échafaud témoignent de la grandeur du personnage.

Constatant que les jeunes générations de Vaudois ignorent généralement qui est le Major Davel, M. Coutaz en appelle à un renforcement de l’enseignement de l’histoire vaudoise, et il propose une ligne pédagogique générale, dont nous reproduisons ici les derniers propos:

Amorcé déjà par Juste Olivier, le portrait de Davel s’affine avec les décennies, se patine jusqu’à incarner le peuple vaudois: sa lenteur, sa douceur, son bon sens, sa résignation. Mais il le dépasse par son désintéressement, son ménagement des autres. Justement, cette « téméraire entreprise» continue à interroger, à séduire et à nous entraîner. C’est sans doute d’être resté un héros à dimension humaine, formaté à la superficie du canton de Vaud, qui fait la puissance et la persistance de Davel.7

Appréciation générale

L’approche de M. Coutaz est avant tout historiographique, mettant en évidence la façon dont les historiens ont présenté la vie et la mort du Major Davel au fil du temps.

Les annexes du livre comprennent notamment une bibliographie fort utile, retraçant des publications diverses de 2022 à 1708.

La présentation des faits nous est apparue honnête et complète. Et nous souscrivons volontiers aux conclusions de M. Coutaz sur la nécessité de renforcer l’enseignement de l’histoire vaudoise.

Notes:

1      Voir notre article «L’année Davel est lancée», dans La Nation n° 2211 du 7 octobre 2022.

2     Gilbert COUTAZ, Le Major Davel, naissance du premier patriote vaudois, Editions Château & Attinger, Orbe 2022, 256 p., fr. 35.–.

3     COUTAZ, op. cit., p. 56.

4     COUTAZ, op. cit., p. 129.

5     COUTAZ, op. cit., pp. 193 à 198.

6     COUTAZ, op. cit., pp. 207 ss.

7     COUTAZ, op. cit., p. 213.

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