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«Noces»

Jean-François CavinLa page littéraire
La Nation n° 1953 2 novembre 2012

Le cinéaste français Philippe Béziat, qui a déjà tourné plusieurs films touchant à la musique, vient de réaliser une œuvre intitulée Noces, consacrée à l’opéra-ballet de Ramuz et Stravinsky. Malgré un début un peu chancelant et quelques approximations, c’est un film fort intéressant et dans l’ensemble réussi. On y suit la préparation d’un concert-spectacle dévolu aux Noces, que les divers interprètes s’approprient progressivement, en même temps qu’est rappelé le processus de création de l’œuvre, datée de 1916, principalement sur la base des Souvenirs sur Igor Stravinsky publiés par Ramuz en 1929. Ce cheminement en contrepoint est stimulant.

Les interprètes sont lyonnais, mais le cinéaste ne manque pas de situer l’action en pays vaudois, avec de belles vues du Léman et de ses rivages. Il nous fait bien pénétrer dans ce chef-d'œuvre, d’ailleurs représenté intégralement à la fin du film; et cela en unissant dans un même espace scénique les chanteurs-acteurs-danseurs et les instrumentistes (quatre pianos et percussions), selon le vœu de Stravinsky que Diaghilev n’a pas suivi lors de la création parisienne.

Noces est une œuvre puissamment originale. Ramuz en a ciselé le texte, dans sa saveur paysanne, en calquant soigneusement ses accents sur ceux de textes russes proposés par Stravinsky. Le compositeur a su combiner des rythmes d’une modernité trépidante avec des inflexions mélodiques d’une simplicité qui semble venue du fond des âges de la Russie éternelle.

Le film de Béziat n’est apparemment guère destiné au circuit commercial des salles obscures. Il a été présenté, dans le registre «art et essai», dans quelques cinémas vaudois et sera encore projeté le 2 novembre à 20h45 au City-Pully (si le cœur vous en dit et si La Nation arrive à temps dans votre boîte aux lettres…). Il sera aussi diffusé par la Télévision suisse romande d’ici à la fin de l’année, à une date encore inconnue.

Cette réalisation offre aussi l’occasion de lire ou de relire les Souvenirs sur Igor Stravinsky, dont la septantaine de pages combine, avec un équilibre parfait et sur un ton chaleureux, le portrait substantiel du compositeur, une chronique de la genèse des trois œuvres communes (Renard, Noces, L’histoire du soldat; le chapitre sur Noces est jubilatoire!), le reflet d’une amitié, l’évocation de notre terre où les deux hommes marchèrent beaucoup et burent passablement, et un art poétique tournant, pour tous deux, autour de la recherche de l’élémentaire qu’il s’agit, pour l’artiste, d’identifier, de transcrire et de magnifier.

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