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Le Requiem de Christian Favre

Jean-François Cavin
La Nation n° 1903 3 décembre 2010
Il est des requiems contemplatifs; il en est de solennels; d’autres sont empreints de contrition, d’autres d’espérance, d’autres encore sont sereins, voire séraphiques. Le Requiem de Christian Favre, composé en hommage à son frère décédé d’une terrible maladie, est tourmenté, torturé par moments. Même les acclamations du Sanctus ont quelque chose de terrifiant. L’Agnus Dei, qui débute de façon presque caressante, progresse bientôt vers un chromatisme angoissé, puis vers une montée déchirante. Toute l’oeuvre baigne dans un climat de souffrance, jusqu’à l’apaisement de la dernière phrase, Dona eis requiem sempiternam, qui se termine toutefois, comme la première pièce et comme le Pie Jesu, sur un accord de quinte vide, effrayant et vertigineux, à l’instar du Requiem de Mozart.

Cette messe des morts du compositeur vaudois a de la grandeur, tant par son inspiration que par son ampleur formelle. Mais sans longueurs: la musique adhère au texte liturgique et va à l’essentiel. Elle est bien proportionnée et fortement contrastée. Les moments intimistes alternent avec les interventions massives du choeur et du grand orchestre. L’auditeur est souvent entraîné dans des crescendos puissants poussés parfois jusqu’au paroxysme, et suivis d’implorations dépouillées. On regrette peut-être que tant d’accents douloureux ne laissent pas s’élever le chant – celui des solistes en particulier – vers une émotion plus simplement touchante et vers une ligne mélodique qui nous resterait en mémoire. On admire en revanche la manière à la fois directe et savante dont le choeur est traité, ainsi que l’orchestration à la fois riche et transparente; elle donne place aussi bien à un poignant solo de violoncelle qu’à de vigoureux et tragiques tutti.

L’exécution impressionnante qui en a été donnée le 24 novembre à la Cathédrale de Lausanne – la première audition vaudoise et la première européenne en version orchestrale intégrale, après la création à Buenos Aires en 2008 – a bénéficié de l’excellence du Choeur Pro Arte, du Choeur de chambre de l’Université de Fribourg et de l’OSR, ainsi que de solistes de rang international, sous la direction magistrale et passionnée de Pascal Mayer. Un enregistrement, en version orchestrale réduite, est d’ores et déjà disponible1, avec d’autres interprètes placés sous la direction de Facundo Agudin, qui a créé l’oeuvre dans la capitale argentine. On espère entendre à nouveau le Requiem de Christian Favre dans peu d’années.


NOTES:

1 S’adresser à DOROn music, case postale 343, 1800 Vevey 1, réf.DRC 2008, Frs 28.–.

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