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Un bon dimanche matin

Olivier Delacrétaz
La Nation n° 1943 15 juin 2012

Le Matin-Dimanche du 10 juin est plein de bonnes choses, à commencer par Le Mail de Peter Rothenbühler qui s’en prend vigoureusement à Sandrine Salerno. La conseillère administrative genevoise propose à ses fonctionnaires de suivre sur leur temps de travail des cours de langage épicène, c’est-à-dire non sexiste. M. Rothenbühler rappelle à propos l’Académie française qui répète inlassablement que la féminisation systématique des noms de métiers «n’a aucun sens», que «le genre dit masculin est en français le genre non marqué.» Dans «L’homme des flux», le maître de l’alambic Christophe Gallaz met en regard le flux continu d’informations qui submerge l’homme d’aujourd’hui et l’obsession du «vintage», c’est-à-dire de l’objet qui paraît ancien. Il décrit le mouvement de fuite perpétuelle et la perte de maîtrise qui l’accompagne, ainsi que la tentative de reprendre la main par la création artificielle de repères fixes. Ces repères illusoires ne font que susciter une fausse nostalgie d’un faux bon vieux temps.

Elisabeth Lévy, dans «Interdisons sans entraves!» dénonce polémiquement les gauchistes de tout poil qui ne supportent pas qu’on use de la liberté d’expression autrement que pour répéter la stricte doctrine dominante, qui sont prêts à tout pour faire taire ceux qui ne parlent pas correctement de l’immigration, de l’identité nationale ou de la sécurité, qui s’acharnent aujourd’hui sur Eric Zemmour et plus encore sur Renaud Camus, au point de le priver de gagne-pain: S’ils aiment tant brailler, écrit-elle, c’est parce qu’ils ne savent plus penser.

Enfin, avec «Comment la Russie peut-elle encore soutenir Assad?» Eric Hoesli, sans taire les intérêts économiques des Russes en Syrie, montre ce qui est essentiel pour eux: Là où les Occidentaux voient un grand mouvement pacifique d’un peuple cherchant à se débarrasser de son tyran, les Russes perçoivent les prémices d’une guerre civile qui pourrait s’avérer effroyable et mettre sens dessus dessous le Moyen- Orient. D’où vient cette différence? Vu d’Europe le scénario semble simple, l’épopée du «Printemps arabe» connaît un nouvel épisode. Vu de Russie, le conflit est d’abord une insurrection de la majorité sunnite soutenue par l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie qui arment les milices de l’opposition. Les minorités alaouites, qui occupent le pouvoir, savent ce qui les attend en cas de renversement. Les chiites craignent eux aussi le pire, comme le prédit l’une de leurs prophéties. Les chrétiens arméniens ou assyriens, traditionnellement et historiquement proches des orthodoxes, sont, comme les Kurdes, pris dans l’étau. Et cette mosaïque complexe se double d’un enjeu politique majeur: il ne fait pas de doute, selon Moscou, que la croisade contre les Alaouites et les chiites que mènent notamment l’Arabie saoudite et le Qatar est encouragée par les Occidentaux qui verraient d’un bon oeil le siège de l’Iran se resserrer.

Le réalisme politique russe nous change de l’interventionnisme militaro-angélique délirant des Européens. Année après année, déconvenue après déconvenue, aveuglés par leur sensibilité immédiate ou leur désir de confort moral, ceux-ci enclenchent ou soutiennent obstinément des mécanismes qui conduisent nécessairement les peuples à des guerres immaîtrisables et à des massacres sans commune mesure avec ceux auxquels on prétend mettre fin.

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