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Pluie d’initiatives en automne

Olivier DelacrétazEditorial
La Nation n° 1974 23 août 2013

«Lancer des initiatives est devenu un jeu d’enfant. Et même un jeu tout court», écrit Mme Judith Mayencourt dans 24 heures du 8 juillet1. Et c’est un jeu auquel les partis ont pris goût.

Le site du parti socialiste soumet à ses membres pas moins de six projets d’initiatives; les écologistes en annoncent trois et le parti des automobilistes trois autres. Quant à la championne, l’UDC, elle a toujours quelque initiative en examen, quelque autre en cours de récolte et deux ou trois en attente de votation ou de mise en œuvre.

Pourquoi un grand parti recourt-il à ce moyen alors qu’il dispose déjà de nombreux représentants au Parlement? Les motifs sont multiples. Lancer une initiative lui permet d’exercer une pression supplémentaire sur le législatif fédéral et de l’inciter à légiférer dans son sens. Le conseiller national Roger Nordmann le dit sans fard: «Sur les transports publics, par exemple, on a obtenu un excellent contre-projet. On ne serait jamais arrivé à ce résultat sans la pression de l’initiative.» C’est sans doute vrai, ça n’en est pas moins discutable, car les signataires s’engagent en faveur d’un texte précis, non d’une manœuvre partisane.

De plus, le procédé contribue à embrouiller la compréhension qu’on a des institutions en faisant jouer à l’initiative le rôle d’une simple pétition.

Lancer une initiative, c’est aussi une manière de secouer les militants. Dans ce cas, peu importe le thème choisi. L’important, c’est les réunions des comités locaux, les stands de récolte, les manifestations de soutien.

Une initiative, c’est encore l’occasion de se rappeler au bon souvenir de la population, de «se profiler» en vue des élections: un simple texte plus ou moins juridique bricolé sur un coin de table y suffit largement. Passées les élections, il arrive que l’enthousiasme des récolteurs baisse au point qu’on oublie purement et simplement l’affaire. C’est ce qui est arrivé l’année passée au parti libéral-radical avec le naufrage, à la fois prévisible et scandaleux, de son initiative «Stop à la bureaucratie absurde!»

La démocratie directe fait pendant à la démocratie parlementaire. Elle joue à son égard le rôle d’un contre-pouvoir. Elle permet à des groupes de toute sorte, non constitués en partis, de faire valoir leurs intérêts et de soumettre au peuple un point de vue différent de celui du législateur.

Il y a une réelle ambiguïté, de la part des partis, à user à la fois du pouvoir et du contre-pouvoir.

L’ambiguïté est peut-être moindre pour l’UDC en ce qu’elle professe que le peuple a toujours raison, que ce soit contre le parlement, contre l’Union européenne, contre les «juges étrangers»… ou contre les cantons. Elle préfère s’adresser au seigneur peuple qu’à ses saints représentants. Ses initiatives sont pour elle un retour aux sources mêmes de la légitimité politique.

Quoi qu’il en soit, la multiplication des initiatives pourrait pousser le parlement, qui n’aime ni la pression de l’initiative ni le contrôle du référendum, à durcir les conditions d’exercice de la démocratie directe. Elle risque aussi d’engendrer une certaine lassitude chez l’électeur… et de l’inciter à soutenir le Parlement.

Pour nous, quels que soient les abus du droit d’initiative ou du référendum, nous n’allons jamais nous plaindre qu’on nous demande notre avis. Aussi bien serons-nous toujours opposés à toute limitation, de forme ou de fond, de ces droits.

Le bruit court que l’UDC prépare une initiative majeure visant à fixer dans la Constitution le principe de la primauté du droit suisse sur le droit international. Nous soutenons ce principe, qui est l’expression même de la souveraineté. La formulation précise du texte de l’initiative pose plusieurs questions cruciales. Nous y reviendrons dès cet automne.

Notes:

1 Bienvenue à la Star’Ac des initiatives populaires.

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