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Une certaine forme de complotisme

Pierre-Gabriel Bieri
La Nation n° 2183 10 septembre 2021

Jacques Baud, spécialiste suisse du renseignement et du terrorisme, a publié cet été deux livres1 consacrés à des événements récents impliquant respectivement la Russie (l’empoisonnement d’Alexeï Navalny) et la Biélorussie (l’atterrissage forcé à Minsk d’un avion Ryanair transportant un opposant politique). Ces deux événements avaient suscité de la part de l’Occident de vigoureuses protestations, puis des sanctions.

L’auteur s’attache à démontrer, non pas que Vladimir Poutine ou Alexandre Loukachenko sont innocents des crimes qu’on leur impute, mais que le monde politico-médiatique occidental juge et condamne sans vraiment disposer de preuves concluantes dans ces affaires. On s’appuie généralement sur des faisceaux d’indices réunissant des éléments dont on ne sait pas s’ils sont liés entre eux, mais que l’on considère comme étant forcément liés puisque cela accuse des gouvernements qui ne correspondent pas à nos standards moraux. De ces indices, on tire alors l’image d’un plan cohérent et machiavélique, image que personne ne remet en question car elle correspond à ce que nous attendons. Quant aux indices susceptibles de mener vers d’autres pistes, ils sont écartés.

En d’autres termes, l’officialité qui n’a de cesse de jeter l’anathème contre les complotistes applique elle-même les procédés qu’elle dénonce chez ces derniers: accusations péremptoires à l’égard des personnalités que l’on n’aime pas, établissement de liens invérifiables entre des événements dont chacun est hâtivement considéré comme une pièce d’un puzzle évident, création d’un récit simpliste où tout se tient.

En attendant d’avoir lu ces deux livres de Jacques Baud, nous nous sommes fait une idée de leur contenu en écoutant l’auteur en parler dans une vidéo, et aussi en lisant un article étonnamment bienveillant de Jacques Pilet dans l’édition du 27 août du magazine Bon pour la tête. Le journaliste, sans conclure sur le fond, salue l’effort et le courage d’une telle analyse et admet que, dans ces affaires, «à chaque fois c’est une lecture prédéterminée, une approche volontairement émotionnelle de la réalité qui a prévalu plutôt qu’une analyse froide et libre des faits».

Notes:

1  L’affaire Navalny, le complotisme au service de la politique étrangère (Ed. Max Milo, juin 2021) et Le détournement du vol Ryanair FR4978 – Le mensonge au nom de la vérité (Sigest, juillet 2021).

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