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Le socio-constructivisme

Cosette Benoit
La Nation n° 1913 22 avril 2011
Professeur de psychologie à la Faculté des Sciences sociales et politiques (SSP), M. Samuel Berthoud a introduit la séance en nous donnant un éclairage sur les fondements théoriques du socio-constructivisme. Le socioconstructivisme1 est une doctrine qui renvoie à l’épistémologie et à la psychologie de Jean Piaget, à laquelle la psychologie de Vygotski ajoute un facteur social.

Biologiste épistémologue et psychologue, Jean Piaget vise à fonder une science de la connaissance qui réponde aux critères de scientificité, en échappant à l’opposition classique: empirisme versus rationalisme. Il distingue trois éléments dans le processus de connaissance: premièrement un sujet2 qui connaît et qui est actif (il classe, ordonne, quantifie, etc.), secondement des objets qui ont des propriétés, c’est-à-dire que le réel résiste à la connaissance, et troisièmement des structures et des formes qui fonctionnent comme moyens pour parvenir à la connaissance.

Considérant que les formes ne sont pas toutes faites au départ, mais qu’elles se construisent par l’activité d’un sujet sur les objets, Piaget déduit que l’individu fait face au réel par accommodation et construit progressivement son savoir. L’intelligence n’est donc pas innée, mais dépend de la faculté d’adaptation d’un sujet à son milieu. L’incorporation de nouvelles connaissances se fait par assimilation selon plusieurs stades de développement (on ne peut pas apprendre n’importe quoi à n’importe quel âge).

M. Berthoud a expliqué qu’un problème apparaît lors du transfert de ces théories à la pédagogie. Si certaines matières se prêtent aux méthodes constructivistes (notamment les matières où il y a des choses à découvrir: mathématiques, physique), ce n’est pas le cas de toutes (on ne découvre pas que Jules César est né un siècle avant notre ère, on l’apprend).

Dans les années 1960, la psychologie de Vygotski – longtemps confinée à un cercle restreint – sort des frontières de l’URSS pour atteindre la Suisse et la France, relayée par des professionnels de l’éducation qui se réclament du marxisme et du socialisme. Vygotski postule que le milieu social a un impact considérable sur le développement intellectuel de l’individu qui s’approprie des connaissances à travers les autres – parents, enseignants, collègues. L’introduction du facteur social dans la théorie constructiviste fait des «formes» de Piaget plus que des formes construites: des formes construites collectivement. Selon l’approche socio-constructiviste, l’apprentissage se fait via l’interaction sociale. En d’autres termes, c’est au moyen de la stimulation collective (discussions, échanges d’idées) que le savoir se construit.

Il faut être conscient du danger du socio-constructivisme qui, à son point extrême, peut mener au formatage de la pensée de l’enfant par soumission au groupe. En guise de conclusion, M. Berthoud a relevé que la méthode socioconstructiviste est utile à ceux qui veulent changer la société par le moyen de l’école.

Pour ne pas écraser nos lecteurs d’articles consacrés à l’école, le dernier exposé de notre séminaire sera présenté dans la prochaine Nation.

 

NOTES:

1 Il faut distinguer le socio-constructivisme du constructionnisme. Le constructionnisme est une doctrine de la sociologie qui s’oppose au réalisme, postulant que toute connaissance est une construction de notre esprit qui dépend de représentations construites collectivement. La réalité telle que nous nous la représentons n’est pas le reflet de principes absolus, mais uniquement le produit d’interactions sociales.

2 Le sujet de la connaissance n’est pas un sujet concret, il s’agit d’un sujet épistémique (abstraction scientifique, idéal-type).

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