Le BPA, c’est zéro
Le Bureau de prévention des accidents (BPA) veut me persuader que j’ai de la chance. Sur le chemin que j’emprunte chaque jour, il l’a placardé trois fois: «Par chance, ils m’ont caché les clés»; «Par chance, ma copine a appelé un taxi»; «Par chance, le barman m’en a empêché».
De la chance? Ça se discute. Des commensaux qui me piquent mon trousseau, c’est quand même une atteinte à la sphère personnelle. Ma copine? Elle a peut-être cru bien faire, mais le taxi, c’est moi qui ai dû le payer. Quant à ce barman, il peut se sentir heureux que je ne m’appelle pas Mark Mu?ller; car il aurait senti ce qu’est une empoignade virile.
D’ailleurs, qu’est-ce qui leur a pris, à tous ces bien-pensants, de me materner de la sorte? J’avais à peine bu deux verres de Coup de l’Etrier, et rafoncé le second qui est devenu le deuxième: avec ce léger bagage, je n’atteins pas 0,5 pour mille, croyez-en ma longue expérience. Alors, pourquoi cette incommodante tutelle?
J’ai compris sur le chemin du retour: ils avaient lu, et trop bien lu, les affiches du BPA, qui ne se bornent pas à réciter des slogans, mais proclament en gros caractères: «0/00». Hé oui! le législateur a fixé 0,5 pour mille, mais les ayatollahs du BPA ne tolèrent pas une goutte de vin. Au nom de quoi se jugent-ils supérieurs à l’autorité légale? Au nom de quoi veulent-ils me priver de quelques gorgées de chasselas à l’heure de l’apéro? Au nom de quoi conspirent-ils pour provoquer la ruine de nos vignerons?
Et comment le BPA finance-t-il cette insane campagne? Avec les suppléments obligatoires aux primes des assurances obligatoires que je paie chaque année. C’est moi qui lui offre les moyens de me morigéner indûment. De l’automutilation, en somme. Quoi qu’en dise le BPA, je n’ai pas de chance.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- Méditation en zig-zag sur la gauche et la droite – Editorial, Olivier Delacrétaz
- «Mamans de l’amour» – Pierre-François Vulliemin
- La mémoire courte – Revue de presse, Philippe Ramelet
- Défense du pays – Revue de presse, Philippe Ramelet
- On centralise… et puis on pleurniche – Revue de presse, Ernest Jomini
- Une vérité à la carte – Cosette Benoit
- Nationalité et citoyenneté – Denis Ramelet
- Une grande heure musicale – Jean-Jacques Rapin
- L’éducation à l’école – Jacques Perrin
- Les officiers se préparent au combat – Félicien Monnier
- Changements de la cyberadministration, baisse des impôts, immuabilité de ceux qui nous le disent – Le Coin du Ronchon