Un autre regard sur la guerre

Ah! me disait hier une aimable et vieille dame française, vive et distinguée, que la Suisse a raison de garder sa neutralité! Vous avez bien raison.

Oui, bien sûr, ai-je répondu, et l’Ukraine aurait bien fait d’en faire autant.

Ma réponse l’a décontenancée, parce qu’elle considère que la Russie mène une guerre injuste, que l’Ukraine n’est peut-être qu’un premier pas dans la conquête de l’Occident, le but inavouable d’un nouvel Hitler. Je lui fais observer que si précisément l’Ukraine avait adopté d’emblée le statut constitutionnel de la neutralité, même bien avant l’arrivée au pouvoir de Zelensky, fameux humoriste de la télévision ukrainienne, elle n’eût donc pas songé à adhérer à l’OTAN, etc… etc… rien ne se serait passé.

La popularité extraordinaire du président est due pour une part au succès mérité et considérable de la série humoristique télévisée qu’il avait créée sous le nom de Serviteur du peuple, titre dont il s’est habilement servi pour créer son parti. Coluche, qui fut aussi candidat à la présidentielle, a eu moins de chance que lui.

Il reste que Volodymyr Zelensky, président d’un Etat non seulement dépourvu du bouclier de la neutralité, mais flirtant au contraire avec Bruxelles comme plusieurs de ses prédécesseurs, a dû faire face, non sans énergie il est vrai, à un ennemi qui l’aurait vraisemblablement laissé tranquille, s’il n’avait pas perçu le danger que représenterait pour lui l’installation de bases peu sympathiques à ses frontières. Il y aurait d’ailleurs maintenant peu de chance que l’homme de Moscou, si la guerre devait s’étendre, veuille épargner une Suisse qui n’est plus aussi neutre qu’elle le fut naguère.