Anticonstitutionnellement
Au détour d’une lecture juridique, suivant une note de bas de page, nous nous sommes arrêté avec étonnement sur ces quelques lignes: «Conformément à une interprétation historique […], le droit au mariage garantit l’union entre un homme et une femme. Le droit au mariage ainsi garanti ne s’étend donc pas aux mariages de transsexuels, ni aux mariages d’homosexuels. De même l’article 12 de la CEDH reconnaît le droit de se marier et de fonder une famille à tout homme et à toute femme, à condition qu’il s’agisse d’une relation entre deux personnes de sexe opposé. L’institution du mariage a toujours visé les couples traditionnels. En l’état actuel, un élargissement à toutes les autres formes de vie en commun dénaturerait l’institution du mariage.»1
Institution fondamentale de notre société, le mariage n’est pas la simple union de deux êtres mais la protection de cette union en vue de la fondation d’une famille. D’une part, c’est ce qui ressort de l’art. 12 CEDH qui garantit «le droit de se marier et de fonder une famille» et sous l’égide duquel se place le message en l’inscrivant en tête du commentaire. D’autre part, «le droit de fonder une famille comporte celui d’avoir et d’éduquer des enfants» 2. Ceci a bien été remarqué par le Conseil national qui, lors de l’examen du projet de Constitution, a ajouté la mention de la famille3. Bien plus, cette évidence du mariage institution familiale est soulignée par les statistiques: plus de 71% des enfants nés en 2021 le sont de parents mariés4. De surcroît, cette analyse est corroborée par la jurisprudence5.
Une modification d’une institution aussi fondamentale ne peut se faire que par le biais d’une modification de la Constitution. Mais nous connaissons la suite de l’histoire. Au mépris de la pierre angulaire de notre Etat de droit (anticonstitutionnellement), le peuple et les cantons adoptaient il y a presque deux ans6 le «mariage pour tous». Se croyant en retard par rapport à certains de ses voisins, le législateur a cru bon d’y ajouter d’emblée le don de sperme pour les couples de femmes, preuve supplémentaire de la relation consubstantielle du mariage et de la fondation d’une famille. A quand la gestation pour autrui? Déjà le Tribunal fédéral n’invoque plus avec rigueur l’ordre public pour condamner cet esclavage des femmes7.
Conclusion: l’aveuglante clarté du texte précité en a ébloui plus d’un. Espérons que la cécité soit de courte durée.
Notes:
1 Message du Conseil fédéral du 20.11.1996 relatif à une nouvelle constitution fédérale, FF 1997 I 1, commentaire du projet d’art. 12 Cst., p. 157 (c’est nous qui soulignons).
2 Message, p. 156.
3 Actuel art. 14 Cst., «Droit au mariage et à la famille»: «Le droit au mariage et à la famille est garanti» (c’est nous qui soulignons).
4 https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/population/naissances-deces/ (consulté le 26.5.2023). C’est encore plus pour les années antérieures.
5 ATF 119 II 264 cons. 3, rendu sous l’empire de l’ancienne Constitution.
6 26.9.2021.
7 Cf. ATF 148 III 245.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- Les quatre temps de la neutralité suisse – Editorial, Félicien Monnier
- L’étatisme ou la confusion des compétences – Sébastien Mercier
- Le libéral et son double – Olivier Delacrétaz
- La subsidiarité à l’épreuve de la guerre. Retour sur l’exercice «LUX 23» – Edouard Hediger
- La vertu de force – Jacques Perrin
- L’heure de gloire du football vaudois – Antoine Rochat
- Bonnes bouilles et mauvaises gribouilles – Le Coin du Ronchon