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Juvenilia CII

Jean-Blaise Rochat
La Nation n° 1915 20 mai 2011
Le 10 août 1792, lors de la prise du palais des Tuileries par la foule des émeutiers révolutionnaires, Louis XVI signe son dernier acte en tant que souverain: c’est un bref billet adressé aux gardes suisses, prêts à sacrifier leur vie pour défendre ce monarque à qui ils avaient juré fidélité. Ils sacrifieront en effet leur vie, mais pour rien. «Le roi ordonne aux Suisses de déposer à l’instant leurs armes et de se retirer dans leurs casernes. Louis.» Cet ordre incompréhensible livre ces malheureux à un carnage prévisible: les Suisses sont égorgés, étripés, émasculés, découpés, sciés, ébouillantés par des hordes livrées aux plus bas instincts. Des femmes se livrent à d’indescriptibles orgies et on assiste même à des scènes de cannibalisme.

Le récit de ces horreurs sème l’effroi parmi les élèves qui demeurent un instant abasourdis. Alors, Théo fait une proposition inattendue: une minute de silence à la mémoire des victimes. Un peu décontenancé par l’idée, j’ironise et affirme que les ados sont réputés incapables de tenir une minute sans parler, sans bouger. Est-ce par véritable piété, ou simplement pour relever le modeste défi que je viens de lancer, que la classe tout entière se lève pour exécuter la proposition de Théo? Il est difficile de se prononcer, mais chacun se livre à l’exercice avec la gravité convenable. A la fin Andrea ajoute dans un soupir accablé:

– C’est normal: les Français n’aiment pas les Suisses.

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