Pauvreté et précarité: quelle évolution récente dans le Canton de Vaud
M. Fabrice Ghelfi, directeur général de la cohésion sociale (DGCS), est venu animer l’entretien du mercredi 21 février au sujet de l’appauvrissement du Canton. A travers diverses statistiques, nous avons pu constater que ce n’est pas le pourcentage de la population pauvre qui augmente, mais sa précarité.
Pauvreté
La notion de pauvreté au sens strict représente les personnes au bénéfice de l’aide sociale, soit 5% de la population. Une personne seule reçoit 1138.– par mois, un loyer compris entre 944.– et 1123.–, ainsi qu’une subvention à l’assurance maladie (la fourchette dépend de la région). Une famille comprenant deux adultes et deux enfants touche 2434.–, ainsi que 1617.– à 1928.– pour le loyer et 1200.– à 1300.– pour l’assurance maladie. Le travailleur pauvre, celui qui travaille tout en étant éligible à des prestations sociales, obtient, à but incitatif, un plus grand avantage. Il est plafonné à 10% du revenu. Dans un autre registre, un rentier AI ou AVS obtient un meilleur revenu, une personne seule par exemple gagnera 1675.– au lieu de 1138.–.
L’indice de pauvreté est dégressif avec l’âge, si 9% des 25-29 ans sont sous le seuil de pauvreté, seuls 5% des 50-59 ans le sont. Les étrangers sont deux fois plus concernés que les Suisses (8,8% contre 4,4%); il n’y a en revanche pas de différence hommes-femmes. En sus, les familles monoparentales (surtout les femmes) et les personnes seules de moins de 65 ans sont particulièrement touchées. Un dernier fait intéressant concernant l’aide sociale: la moitié des bénéficiaires en sort chaque année; ce mouvement est compensé par une autre vague équivalente d’entrées.
Précarité
La direction de la cohésion sociale divise la population en déciles allant du plus pauvre (P1) au plus riche (P10). Pour comprendre la précarité, il faut calculer le potentiel de consommation d’une personne, ce qui revient à soustraire de son revenu les impôts et son assurance obligatoire. Les 10% les plus riches (P10) possèdent un potentiel de consommation de 130’000.– au minimum. La classe moyenne se situe, d’après le Canton, entre les déciles P3 et P8, son potentiel de consommation est de 40’000 à 85’000.– Les plus pauvres comprennent le premier décile P1 (pauvreté au sens large), qui ont jusqu’à 30’000.– de potentiel de consommation. Jusqu’à 50’000.– (déciles P2 à P5), la situation d’un individu est considérée comme précaire, c’est-à-dire qu’en cas de survenance d’aléas de la vie, il se retrouve en dessous du seuil de pauvreté.
Pour résumer, 10% des habitants du Canton correspondent à la définition large de la pauvreté, les 40% suivants sont considérés comme précaires. Les deux causes majeures de la précarité sont le divorce et la retraite. Les ménages de la classe moyenne inférieure (P3-5) sont les plus sensibles à l’inflation. L’augmentation de cette dernière depuis 2020 leur a coûté cher: on estime qu’une famille, du quatrième décile (P4), avec deux enfants, a perdu toute son épargne mensuelle. La présentation de Monsieur Ghelfi n’aura cédé place à aucun doute: depuis quelques années, le porte-monnaie des Vaudois a rétréci.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- Désordres à l’Université de Lausanne – Editorial, Félicien Monnier
- Balade héraldique en pays de Vaud – Jean-Blaise Rochat
- Drogues à Lausanne: on n’arrête pas le progrès – Lionel Hort
- 10 + 4 – Jean-François Cavin
- Occident express 121 – David Laufer
- † Pierre-Yves Favez – Olivier Delacrétaz
- Consommer local ou national? – Benjamin Ansermet
- Un casse-cou – Jacques Perrin
- Il est interdit de ne pas interdire – Le Coin du Ronchon