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Coupable égale barbouillable

Le Coin du Ronchon
La Nation n° 2173 23 avril 2021

Dans la famille Barbapapa, on connaissait Barbouille, l’artiste hirsute. Mais ça, c’était avant. Barbouiller, aujourd’hui, n’est plus une activité artistique. C’est désormais un acte militant. Vous êtes mécontent, contrarié, indigné? Barbouillez!

On a connu, il n’y a pas si longtemps, des anarchistes qui pratiquaient une autre forme de barbouillage, moins salissante et plus élégante: l’embardouflement de tarte à la crème. Ces entarteurs entartaient autant à gauche qu’à droite, et ils se prenaient parfois quelques sévères rossées. Mais ça, c’était avant. Aujourd’hui, ce sont les pompeux cornichons qui barbouillent, à la peinture, et en toute impunité.

On en a beaucoup vu au cours de ces dernières semaines. A Fribourg, des féministes irascibles sont allées barbouiller de peinture les voitures du journal La Liberté (tout un symbole). Au même moment, à Lausanne, ce sont des véhicules de pompiers qui ont été maculés par une branche dissidente des zadistes du Mormont. (Les zadistes officiels n’ont pas osé assumer. A moins, peut-être, qu’il ne s’agisse de la conseillère municipale en charge de l’immobilité, qui ne veut plus voir aucun véhicule, fût-il de la couleur de la majorité, traverser sa ville.) Mais on se souvient aussi que l’aérodrome de la Blécherette, il y a quelques mois, a eu droit au même barbouillage, de même que le Grand Théâtre de Genève il y a quelques années. Les exemples abondent, toujours fondés sur le même réflexe: coupable égale barbouillable!

Quelles seront les prochaines cibles des barbouilleurs?

Les voitures: c’est fait. Les avions: c’est fait. Les trains sont régulièrement tagués, mais pas pour des motifs idéologiques, car ils sont des icônes de la Juste Foi. Il reste donc les bateaux. Tous les bateaux. Même les voiliers. En France, après la suppression des subventions accordées à une association offrant des baptêmes de l’air à des enfants handicapés (la maire de Poitiers ne veut plus que l’aviation fasse rêver les enfants), ce sont celles versées à un club de navigation à voile qui sont contestées, au motif qu’il ne faut pas subventionner «des sports qui émettent des polluants».

On peut bien en rire; en attendant, et avec le retour des beaux jours, les rives du Léman risquent bien d’offrir un nouveau terrain d’indignation aux barbarEsbarbouilleurs.euses de la Juste Foi. «Iels» seront alors tout au bord de l’eau. Très près du bord. Mais on aurait tort de nous prêter des intentions que nous n’avons pas.

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