De la difficulté à changer le changement
Dimanche passé, la nuit a duré, une fois de plus, une heure de plus. Certains ne s’en plaignent pas. D’autres s’en plaignent, au motif que leur rythme biologique s’en trouve bousculé – ce qui laisse à penser que leur rythme biologique est techniquement coordonné avec la position des aiguilles sur le cadran de leur montre, auquel cas une solution pourrait être de ne pas bouger les aiguilles mais de déplacer la position des chiffres.
Bref, tout le monde n’est pas d’accord quant à l’opportunité des changements d’heure. Mais l’argument de la pénibilité du réglage et re-réglage de toutes les horloges de la maison a peu à peu perdu de sa force avec l’automatisation de plus en plus généralisée desdites horloges: de nos jours, il n’y a plus guère qu’une belle montre-bracelet traditionnelle et une horloge murale à l’effigie du Président qui sollicitent encore notre attention un dimanche matin de mars et un autre en octobre. Conséquemment, une majorité se dégage désormais pour ne plus changer. Cette position de principe contre le changement nous paraît de bon aloi.
Encore faut-il que la fin des changements (d’heure) soit validée par le monde politique; et c’est là que les choses se gâtent. Tous les pays européens se déclarent d’accord de ne plus changer (d’heure) au point que, chaque année, on nous promet que c’est le dernier changement (d’heure) – le der des ders. En revanche, tous les pays européens ne s’accordent pas sur le moment du dernier changement (d’heure). Les uns voudraient rester à l’heure d’hiver, les autres à celle d’été – alors que, si on y réfléchit, cela ne fait aucune différence puisque c’est seulement une question de notation des heures, qui n’empêche pas de définir librement les horaires de travail et de repos selon les saisons et les latitudes. On pourrait laisser chaque pays faire comme il veut, ce qui créerait un joyeux capharnaüm continental mais aurait l’avantage de résoudre le problème sans délai et de permettre à ceux qui aiment changer d’heure de continuer à le faire en voyageant. Hélas, les politiciens qui font l’éloge de la diversité dans leurs discours ne la tolèrent pas dans la réalité: nous allons donc continuer de changer d’heure deux fois par année parce que l’Union européenne n’arrive pas à déterminer le meilleur moment pour s’arrêter.
Exprimé d’une autre manière, le changement d’heure ne va pas changer tout de suite car il constitue un changement régulier, que l’on s’est habitué à ne pas changer, tandis que l’abandon du changement d’heure représente un vrai changement, auquel il est difficile de se résoudre car, comme tout changement, il pose des problèmes à ceux qui, comme tout le monde, n’aiment pas le changement.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- La ZAD nouvelle est arrivée! – Editorial, Félicien Monnier
- La pédale fédérale – Jean-François Cavin
- Toujours plus haut vers le nivellement par le bas – Sébastien Mercier
- La Feuille de Chêne ne jaunit pas – Jacques Perrin
- Occident express 93 – David Laufer
- Une initiative malheureusement irrecevable – Olivier Delacrétaz
- Le noble bréviaire de Vincent Grandjean – Vincent Hort
- Programme télé – Arnaud Picard
- Les Alémaniques à la rescousse du français? – Benoît de Mestral
- Deux futurs maréchaux torturés – Jacques Perrin