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Surreprésentation urbaine

Le Coin du Ronchon
La Nation n° 2217 30 décembre 2022

On connaissait déjà MBS, le prince saoudien. Désormais, nous avons EBS, notre nouvelle conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider.

Les Jurassiens, quel que soit leur bord politique, ont exulté de joie à l’annonce de l’élection de leur première compatriote à l’exécutif fédéral, rappelant ainsi que l’appartenance à un canton est plus forte que l’appartenance partisane.

Ceux qui ont eu bien de la peine à dissimuler leur désappointement, en revanche, ce sont les principaux éditorialistes de la grande presse. Eux qui à longueur d’année nous parlent avec passion des minorités, du respect de leurs droits, de l’importance de leur représentation, de la justesse de leurs revendications, découvrent aujourd’hui un Conseil fédéral dominé par deux minorités… qui ne les passionnent guère.

Pour ce qui concerne la minorité romande, ou latine, les journalistes romands, bien sûr, ne la boudent pas (du moins lorsqu’elle se montre ouverte sur le monde et progressiste) et ce sont donc leurs confrères alémaniques qui, après le 7 décembre, ont laissé libre cours à leur agacement. Ce n’est pas très sympa de leur part, mais c’est de bonne guerre.

Reste la minorité «non urbaine», et là, tout le monde ou presque semble trouver problématique que la Suisse puisse être dirigée par des ploucs qui – fussent-ils inscrits au Parti socialiste – ne connaissent rien à l’admirable modernité des grandes villes. La population de la campagne ne forme pas une minorité très fascinante aux yeux de journalistes qui craignent un peu ces gens trop lents, trop calmes, trop ancrés dans la terre et pas assez versés dans les abstractions intellectuelles. Quand on rédige des articles depuis de grands buildings, la campagne représente surtout un concept théorique: des zones à protéger dans des plans d’aménagement, des surfaces d’assolement, des statistiques sur le mitage. Et, bien sûr, des zones de détente pour citadins stressés qui y viennent à vélo pour soigner leur éco-anxiété, ou avec leur SUV tout propre et bardé d’électronique pour y faire provision de légumes bio.

De fait, si les origines campagnardes apparaissent très présentes au sein du nouveau Conseil fédéral, on peut se demander si elles ne sont pas sous-représentées parmi les commentateurs de presse.

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