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Le passé est-il simple?

Yves Gerhard
La Nation n° 2012 20 février 2015

Justin Favrod entame une troisième vie. Après avoir été historien, spécialiste de l’Antiquité tardive et des Burgondes, il est devenu journaliste au service de divers quotidiens, dont 24 heures, et conseiller personnel de Pascal Broulis. Sa nouvelle activité? Rédacteur de la revue Passé simple, qu’il a créée de toutes pièces à la fin de l’année dernière. Deux fascicules de 36 pages ont été publiés, le numéro de lancement et le numéro 1, qui est sorti de presse en janvier. Selon M. Favrod, la manière de travailler de l’historien est différente de celle du journaliste: le premier part des faits et des documents pour aboutir à des idées générales ou à des conclusions historiques, alors que le travail du second, au contraire, consiste à partir des résultats (tel accident, telle élection ou décision politique, par exemple), pour remonter aux causes, au récit des faits, au déroulement qui a précédé le résultat qui fait l’objet de la nouvelle.

La rédaction d’une revue historique procède probablement d’une troisième voie: il s’agit de présenter au lecteur des faits passés sous un jour agréable et peut-être nouveau, de veiller à l’exactitude de l’historien «sérieux» tout en ménageant une certaine facilité de lecture qui convient à une revue de vulgarisation. Fort des succès des périodiques français comme Historia ou Dossiers de l’archéologie, Favrod cherche à occuper le créneau de l’histoire des pays romands, qu’il connaît bien. D’où un agréable mélange des périodes, de l’archéologie au monde contemporain, de faits connus et d’autres qui ne le sont pas du tout, d’articles de diverses étendues, avec des rubriques bienvenues, comme la balade historique (autour de Payerne; de Châtillens à Palézieux sur les traces de l’abbaye d’Haut-Crêt, par Jean-Pierre Dewarrat) ou la recension des publications nouvelles dans le domaine de l’histoire des cantons romands.

Chaque fascicule commence par un dossier, le numéro de lancement sur la reine Berthe et surtout sur sa fille, l’impératrice Adélaïde – tout cela est très payernois, comme on le voit –, et le numéro 1 par une période sombre de notre histoire, la Genève de novembre 1932, avec la fusillade sur les manifestants, ou les «émeutiers», selon le point de vue adopté. D’autres articles suivent: toponymie, archéologie, faits divers du passé, etc. Chaque numéro contiendra, on peut le parier, un article ou un autre qui retiendra le lecteur. En tout cas, des sujets cocasses ou inattendus sont présents dans le fascicule 1, comme «Une Carougeoise tue son adversaire en duel» ou l’article sur les échelles d’Albinen, au-dessus de Loèche, par lesquelles les habitants passaient aisément sans avoir le vertige!

Le rédacteur n’est pas seul: il est entouré de spécialistes du graphisme, de l’iconographie, de l’infographie, mais les auteurs d’articles aussi sont nombreux: on trouve dix signatures dans le numéro 1, à côté de celle de Justin Favrod. Celui-ci est donc bien entouré, ce qui contribue à la richesse et à la variété de l’information.

Essayons de répondre à la question du titre! Non, la présentation du passé n’est pas chose aisée. Les lecteurs jurassiens ont été surpris d’apprendre que leurs villages dont les toponymes se terminent par -court (Bassecourt, Boncourt…) étaient un temps habités par des germanophones! Les autres (Courgenay, Courtelary…) l’étaient par des gens qui parlaient le (très) bas latin! Tous ont été «dégermanisés», ouf! Un tel article peut soulever des passions. L’emplacement de l’abbaye d’Haut-Crêt a, lui aussi, été disputé longtemps entre les spécialistes. Quant à la présentation de la fusillade de Genève, on pourrait aussi discuter le point de vue suggéré par l’article et ses conclusions.

Autre problème: comment présenter de façon accessible, tout public, des questions souvent réservées au spécialiste? La bonne vulgarisation choisie par l’initiateur de la revue permettra de plaire autant que d’instruire, selon la formule du Grand Siècle. Dans ce domaine, le journaliste aidera l’historien. Bon vent à Justin Favrod et à sa revue!

Recommandation à tous ceux qui avouent ignorer quelques recoins de l’histoire de la Suisse romande: abonnez- vous à Passé simple au moyen de la carte se trouvant dans cette Nation ou via www.passesimple.ch!

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