Identification
Veuillez vous identifier

Mot de passe oublié?
Rechercher


Recherche avancée

Les salaires en francs forts

Jean-François Cavin
La Nation n° 2012 20 février 2015

Parmi les victimes du franc fort, l’industrie du tourisme figure en tête de liste, car les offres de substitution à nos montagnes neigeuses abondent et les possibilités de rationalisation connaissent d’étroites limites. Le consultant haut-valaisan Peter Furger, avec le réalisme brutal propre à son ethnie, en tire la conclusion dans 24 heures du 10 février: Depuis 2009, année où l’euro valait 1 fr. 60, on a perdu 30 % de nuitées. C’est énorme. Il faut faire baisser les coûts […], en agissant sur les prix des marchandises à l’importation […] et aussi en n’ayant pas peur de briser des tabous comme les salaires des frontaliers.

Mais peut-on payer différemment les Suisses et les frontaliers? Des juristes répondent par la négative: ce serait contraire à l’Accord sur la libre circulation des personnes, qui prohibe la discrimination des travailleurs communautaires en Suisse (et vice-versa, mais c’est moins d’actualité). A vrai dire, on peut hésiter. Le texte de l’Accord et de ses annexes ne dit rien du gain de change. Les salaires étant librement convenus en Suisse, sous réserve des conventions collectives et de la sous-enchère abusive, il y a une marge de manœuvre. Et quand le frontalier voit du jour au lendemain son pouvoir d’achat augmenter de 20 %, n’est-ce pas le Suisse qui est discriminé? Et serait-il discriminatoire de faire dépendre une partie de salaire, pour tous, du pouvoir d’achat au lieu de domicile?

Bien sûr, un changement contractuel ne peut pas être unilatéral et immédiat. Bien sûr, c’est une matière qui appelle la concertation entre partenaires sociaux, quand ils existent dans la profession. Encore faut-il que le dialogue soit ouvert. On a entendu un syndicaliste, à la télévision, réclamer haut et fort des négociations; un peu plus tard, à la question de savoir si les payes pouvaient être revues à la baisse, il a répondu que c’était exclu. Alors, négocier sur quoi? Sur le prix du café à la cantine d’entreprise?

En attendant, à Courgenay, les frontaliers d’une entreprise technique ont spontanément proposé une baisse de leur rémunération à raison de 10 %, préférant un emploi moins payé à pas d’emploi du tout. L’économie suisse ne va pas nécessairement vers la crise, mais il faut se préparer à quitter les habitudes de la très haute conjoncture et, parfois, à lutter pour la survie. Dans le tourisme en particulier, discrimination ou pas.

Vous avez de la chance, cet article est en accès public. Mais La Nation a besoin d'abonnés, n'hésitez pas à remplir le formulaire ci-dessous.
*


 
  *        
*
*
*
*
*
*
* champs obligatoires
Au sommaire de cette même édition de La Nation: