La revanche du Père Fouettard

Les jeune.e.x.s militant.e.x.s éco-anxieux.se.x.s ont décidément bien raison d’attirer notre attention sur le réchauffement climatique, ce sujet dont notre société parle si peu. Leur effort est méritoire, d’abord parce que nous sommes dans une saison où ce phénomène se remarque peu, et ensuite parce que de nombreuses personnes semblent ne pas y prêter toute l’attention requise.

C’est le cas, par exemple, des agents de l’inspection du travail qui, après être allés contrôler des commerces en ville de Lausanne, ont annoncé publiquement que les températures y étaient souvent trop basses – entre 13,9 et 17,9 degrés, nous dit-on. N’est-il pas irresponsable, du point de vue de la communication, de laisser entendre que des températures peuvent être «trop basses» à une époque où le climat, nous assure-t-on, est beaucoup trop chaud? Et les apôtres de la décroissance de notre confort n’exigent-ils pas que la température dans nos logements soit limitée à 19 degrés au maximum? Est-ce à dire que la légalité se résume désormais à une étroite plage de température supérieure à 17,9 degrés et inférieure à 19,1?

S’il faut dénoncer le rôle ambigu joué par le professeur Anders Celsius dans la lutte contre le réchauffement, il faut à plus forte raison pointer du doigt les comportements déviants de Ferdinand Porsche et de Saint-Nicolas, le second ayant rejoint une école de la région bruxelloise, le 6 décembre dernier, à bord d’une voiture construite par le premier, escortée avec tout le décorum dû à une telle visite. Des fatwas écologistes ont aussitôt été lancées sur internet, déplorant ce «mauvais exemple donné à la jeunesse» (Jésus, lui au moins, n’utilisait que des moyens de transport écoresponsables) et des notables locaux furieux auraient déclaré, si l’on en croit le site internet de 20 Minutes, qu’«on se croirait dans un autre monde et à une autre époque […] à l’heure où l’on prône la mobilité douce».

Il est flippant de réaliser ainsi que Saint-Nicolas n’est pas un type de notre époque. Et son arrivée pétaradante devant de jeunes âmes sensibles justifierait, en l’occurrence, qu’il soit fouetté par le Père Fouettard. Celui-ci, régulièrement accusé d’appropriation culturelle pour s’être artificiellement assombri la peau, et nonobstant le fait qu’il était lui aussi assis dans la Porsche, tiendrait alors enfin sa revanche en se spécialisant dans un rôle de punisseur des adultes qui se sont montrés éco-désobéissants au cours de l’année.