De la matouphobie au félinicide
Les défenseurs du climat ont eu une nouvelle idée. Ou plutôt ils ont inventé une nouvelle déclinaison de leur seule et unique idée.
Après avoir scientifiquement décrété que, pour sauver l’humanité d’une fin atroce, nous ne devons plus nous déplacer en voiture; que nous devons bannir les voyages en avion; que nous devons oublier toute forme de promenade en forêt; que nous ne devons plus nous aventurer à plus de quinze minutes à pied de chez nous; que nous devons nous résigner à vivre dans des logements beaucoup plus petits et non chauffés; que nous devons recouvrir de peinture rouge les tableaux célèbres exposés dans les musées; que nous devons évidemment proscrire toute consommation de viande, de vin, de chocolat et d’autres bonnes choses; et que nous devons enfin envisager de vivre dans un pays sans vaches, sans paysans et idéalement sans êtres humains; après ces quelques premières recommandations, donc, les experts qui nous promettent un monde meilleur commencent à nous habituer à l’idée que nous allons aussi devoir nous passer de nos animaux de compagnie, et en particulier des chats, accusés de troubler l’équilibre naturel.
Selon la presse (l’info est sortie à la… mi-août), l’Association suisse pour la protection du climat réfléchit à lancer une initiative populaire demandant un moratoire sur les chats et les chiens.
Pourtant les activistes climatiques hésitent, car ils savent que le sujet est sensible. Ils craignent que les mêmes personnes qui sont prêtes à sacrifier leur liberté, leur plaisir, leur confort, leur avenir et leurs enfants… puissent soudain réagir négativement à la perspective de perdre leurs matous.
Dans l’immédiat, pour ne prendre aucun risque, les défenseurs du climat vont se rabattre sur des revendications plus classiques – une extension de la taxe sur le CO2 et la création d’un département de la durabilité au sein de l’administration fédérale (prière de ne pas rire). Mais le sujet des chats reviendra. Tôt ou tard, au nom de la préservation de la biodiversité1, on exigera que nous les exterminions – en les empoisonnant au «ChatGHB» pour dissuader tout «recyclage» dans du ragoût. Nous verrons alors les Grands-mamans pour le climat affronter les Grands-mamans pour les chats (à supposer que les deux groupes soient clairement distincts) et traquer les pauvres bêtes jusque sur les gouttières de nos toits, en chantant: «Ah, ça ira, ça ira, ça ira, les Aristochats on les pendra!»
1 Dans le cas tragique où l’initiative pour la biodiversité serait acceptée le 22 septembre, les petites filles n’auront probablement plus le droit de porter des habits ou des sacs Hello Kitty.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- Université pour tous – Editorial, Félicien Monnier
- La Suisse, Etat social – Jean-François Cavin
- Fusion ou… fission? – Evan Lumignon
- Le volume XIII de l’Encyclopédie vaudoise – Daniel Laufer
- Ça bouchonne à Bruxelles – Jean-François Cavin
- Trois façons de décider en assemblée – Olivier Delacrétaz
- LPP: réformer n’est pas dénaturer – Jean-Hugues Busslinger
- Encore des mercredis – Benjamin Ansermet
- Nous avons les conséquences – Jacques Perrin
- Echos vaudois des JO de Paris 2024 – Antoine Rochat