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Le référendum des paroisses

Olivier Delacrétaz
La Nation n° 2263 4 octobre 2024

Le Synode du 19 avril dernier a remodelé en profondeur l’Eglise évangélique réformée du Canton de Vaud. La Nation1 a déjà signalé la suppression des régions et, dans un délai de cinq ans, la réduction de deux tiers du nombre des paroisses. Une autre nouveauté est la création d’un droit de référendum des paroisses. Le texte, accepté par le Synode avec cinq oppositions et sept abstentions, est le suivant: Les décisions du synode (hors comptes, budget, nominations, et élections) peuvent faire l’objet d’une demande de référendum si un tiers des communautés paroissiales le demande ; une procédure réglant l’exercice du référendum est instituée.

La locution «communauté paroissiale» est une finesse de vocabulaire pour distinguer les futures paroisses agrandies des paroisses actuelles. Nous en resterons au terme de «paroisses».

Trois objections ont été émises. La première est classique, provenant de ceux qui se méfient de la démocratie directe et du recours au peuple: le Synode a été élu pour décider, il est mieux informé que le reste de la population, il a consacré plus de temps à réfléchir et à débattre. Dès lors, que chacun se contente de faire son travail: le peuple élit, le Synode décide, et les brebis sont bien gardées. La seconde objection est que le référendum favorise les tendances en général conservatrices des paroisses. La troisième est que le référendum est un facteur de ralentissement, alors que tout est tellement urgent.

Nous répondons, premièrement, qu’entre le référendum et la décision populaire, il y a un délai durant lequel les paroisses ont le temps de s’informer, de réfléchir et de débattre elles aussi. De plus, c’est un fait que les représentants des paroisses ne les représentent pas toujours, notamment quand ils réduisent par étape les compétences paroissiales ou quand ils prennent des décisions «audacieuses» en matière morale ou sociétale. Le droit de référendum permet à l’électeur de se rappeler à leur bon souvenir.

Secondement, les progressistes et ceux qui se jugent «innovants» n’ont pas toujours forcément raison contre les conservateurs. Il peut être vital de surseoir, voire d’abandonner une voie empruntée dans l’enthousiasme, mais qui, à froid, se révèle sans issue.

Quant à la troisième objection, c’est vrai que le référendum ralentit ou réoriente la marche des affaires. Mais cela peut être utile, nécessaire même. Comme on le sait, «le temps ne respecte pas ce qui se fait sans lui». De plus, invoquer l’urgence est souvent une manière de mettre les gens devant le fait accompli.

Le lancement d’un référendum permet à chacun d’exprimer ce qu’il a sur le cœur lors des débats qui précèdent le vote. C’est une thérapie institutionnelle qui remet les compteurs à zéro et évite cette accumulation de rancœurs rentrées dont le Synode a trop souffert ces dernières années.

Enfin, le référendum présente cet avantage qu’il sert même quand on ne s’en sert pas. La crainte de sa mise en œuvre aidera le Synode à travailler en se rappelant qui l’a élu. La crainte du référendum paroissial est le commencement de la sagesse synodale.

Comme on l’a vu, le texte ne donne que le principe. De nombreuses questions restent à régler. Qui, par exemple, engage officiellement la paroisse dans une demande de référendum? Il nous semble que le Conseil paroissial serait l’organe adéquat: il peut se réunir rapidement et sans gros problème d’organisation, ce qui est particulièrement utile quand les décisions synodales sont prises à la veille des vacances.

Combien de temps cela demanderait-il? Comptons dix jours pour que la décision synodale soit notifiée officiellement aux Conseils paroissiaux; puis un délai de trente à soixante jours pour le dépôt de la demande par les dix paroisses; enfin, soixante jours – campagne, information et débat – pour préparer le vote, simultané, des assemblées de paroisses. Environ quatre à cinq mois, ce n’est pas très long, même si on y ajoutait certaines périodes (vacances, période de Noël) durant lesquelles le délai ne courrait pas.

Un problème se pose, qui est spécifique à notre Eglise multitudiniste. Vient qui veut à l’Eglise… et à l’Assemblée paroissiale. Il n’y a pas de carte de membre. Dès lors, qui est habilité à voter? Nous dirions que, comme à l’ordinaire, ce sont les paroissiens, représentés par les personnes présentes à l’Assemblée paroissiale. Le risque de «menées» nous paraît négligeable.

L’introduction du référendum des paroisses contribuera à rééquilibrer et renforcer le système presbytéro-synodal et avec lui les relations entre les paroisses et l’Eglise cantonale. Et, qui sait, peut-être sera-ce même une source d’inspiration pour l’Etat de Vaud dans ses relations avec les communes vaudoises…

Notes:

1   Voir La Nation n° 2252 du 3 mai 2024, «L’avenir des paroisses vaudoises».

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