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Nos voisins et nos exilés

Olivier DelacrétazOn nous écrit
La Nation n° 1989 21 mars 2014

Notre article «T’es vaudois si…» nous a valu quelques réactions. M. Hubert Barde nous écrit:

Fidèle lecteur de La Nation, c’est non seulement en ma qualité de Genevois mais aussi en tant que Suisse que je me permets de vous écrire.

J’ai en effet été pour le moins surpris par les propos de première page de M. Olivier Delacrétaz parus dans le numéro de La Nation du 7 mars 2014, sous le titre «T’es vaudois si… Tu te reconnais plus d’affinités psychologiques et linguistiques avec un Aiglon ou un Yverdonnois qu’avec le Genevois d’à côté…».

Après notamment, en en forçant un peu le trait, les récents propos de M. Blocher sur les Suisses moins suisses que d’autres Suisses, ne conviendrait-il pas d’offrir un front uni face à ce qui pourrait devenir de l’incompréhension entre Confédérés? Cultiver des affinités entre cantons ne vaut-il pas mieux et plus qu’un certain cloisonnement identitaire? Les différences entre cantons, qu’elles soient culturelles, historiques, linguistiques, psychologiques ou autres ne sont-elles pas, au contraire et heureusement, facteurs d’enrichissement mutuel et non de rejet, ce pour le bien de la communauté des États et des citoyens de ce pays?

Hubert Barde

La lettre de M. Barde nous donne l’occasion de rappeler que l’affirmation de soi-même n’est pas vouée à se transformer en «cloisonnement identitaire». Elle ne débouche pas forcément sur le rejet de l’autre. Au contraire, les personnes les plus craintives à l’égard de l’étranger sont celles dont les racines communautaires sont les moins solides et les plus menacées. Les personnes sûres d’elles-mêmes sont plus facilement accueillantes.

Nous avons intentionnellement parlé uniquement d’«affinité psychologiques et linguistiques». Ces affinités marquent l’appartenance à la communauté cantonale indépendamment des relations personnelles bonnes ou mauvaises qu’on peut avoir avec tel ou tel représentant d’un autre canton.

Il ne peut d’ailleurs y avoir d’«enrichissement mutuel» qu’entre des communautés nettement différentes et qui le restent obstinément. On peut même dire que cet enrichissement sera d’autant plus important que chaque communauté approfondira et vivra davantage ses particularités.

* * *

Pour sa part, Mme Janine Membrez- Porchet, de Delémont, proteste de sa qualité de vaudoise exilée:

Mon nom de jeune fille est Janine Nelly Violette Porchet. Je suis originaire de Corcelles-le-Jorat et née à Lausanne en 1937. Avant d’être obligée de partir pour Bâle où ma mère avait déménagé, j’ai passé mon enfance à Bretigny-sur-Morens.

Je vous l’affirme, je suis vaudoise même si… vous avez omis mon cas. Je suis Vaudoise même si j’habite Delémont. Mon mari, qui n’est pas un rabotson, vous le dira lui-même et il en est fier pour moi. Je suis vaudoise, même si je risque de tomber en cambant un obstacle dans mon beau jardin, et si je compte ici dans le Jura beaucoup d’imperdables dans mes tiroirs à couture. Je suis Vaudoise, même si j’ai perdu un peu mon accent. Il faut être niobet pour ne pas me croire. Vous en êtes convaincu, je n’insiste pas. On peut être Vaudois même si… et même que… l’on aime le carnaval de Bâle.

Merci de m’avoir entendue.

Janine Membrez-Porchet

La nationalité est une participation à quelque chose qui nous dépasse dans l’espace et dans le temps. On ne s’en déprend pas facilement. De même qu’il faut deux ou trois générations à une famille nouvellement venue pour s’approprier non seulement l’accent, cela vient assez vite, mais les souvenirs collectifs, les références culturelles et historiques, de même, il faut du temps pour perdre complètement les traces mentales et morales de son origine. C’est plus qu’une affaire individuelle.

Reconnaissons-le en disant à notre exilée: «T’es vaudoise si tu recours spontanément aux précieux mots que tu as énumérés, t’es vaudoise si tu gardes une nostalgie, même un peu mythifiée, du pays de tes ancêtres, t’es vaudoise si tu continues à en penser et à en dire du bien dans ton pays d’adoption, et t’es vaudoise si tu continues à lire La Nation

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