Les Gnagnagnas
La Liberté a la chance d’avoir en M. Pascal Bertschy un journaliste dont les propos inattendus contrastent heureusement avec le conformisme de nombre de ses confrères. Le 8 mars nous avons particulièrement apprécié «La complainte des Gnagnagnas» suite à la votation sur l’immigration du 9 février:
[…] En l’espace d’un mois, une tribu nous a appris que cette votation ne nous laissait pas le choix.
La seule réponse possible à apporter à la question de l’immigration de masse, pour le clan des Gnagnagnas, était non. Sauf que le peuple, on le sait, a répondu oui. Cet étourdi a cru qu’il pouvait voter autre chose que non.
Du coup, dès le soir du 9 février, on a senti des vagues de dépit et d’accablement monter dans la poitrine des Gnagnagnas. Il est comme ça, le Gnagnagna: délicat. Vite déçu, aussi, mais pas du style à s’avouer vaincu. D’où le baroud-doudou qu’il livre, depuis des semaines, dans les médias.
Le trouvant plutôt sympa, les médias consolent en effet le Gnagnagna en diffusant religieusement sa complainte. C’est ainsi que le peuple réalise, peu à peu, sa bévue. Pas un jour ne passe sans qu’un Gnagnagna ne lui répète: le résultat de la votation est une «katastroph». Nous n’avons pas compris l’enjeu de cette initiative «stupide». Total, dans la tribu, on a parfois «honte d’être suisse». C’est d’ailleurs «la fin de la Suisse», gnagna, et «la faillite du modèle suisse», gnagnagna, faillite que certains pays prospères de l’Union européenne – Bulgarie, Grèce, Irlande, Roumanie, etc. – contemplent probablement avec effroi.
Le mieux, dans ces conditions, serait de procéder à une nouvelle votation. Il faut revoter, oui, parce que gnagnagna. Bon, d’accord, les amis, revotons. Mais si le peuple ne suit toujours pas? Eh bien, on votera autant de fois qu’il faudra jusqu’à ce que la majorité dise oui.
[…] Cela dit, les Gnagnagnas n’ont rien de méchant. Ils veulent juste notre bien et celui du pays. Ils sont donc consternés, à ce titre, de voir combien la démocratie est une folie ne produisant «que du vent». Sont sincèrement navrés de constater que les Suisses sont des sous-informés, des obtus, des égarés, des naïfs ou, pire, des Tessinois.
Les Gnagnagnas, eux, savent ce qui est juste et bon. Seule chose qu’ils ignorent: beaucoup de gens ayant voté comme eux se sentent bien mal représentés par de tels rabâcheurs. […]
Nos politiciens élus du peuple n’ont rien vu venir, parce qu’ils sont trop souvent coupés de la population. On peut souhaiter que certains d’entre eux sauront s’élever au-dessus de la complainte des Gnagnagnas. Il faut trouver des solutions aux problèmes difficiles posées par le oui du 9 février, qui est le fait d’une faible majorité du peuple, mais – on l’a trop peu souligné – des deux tiers des cantons.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- M. Blocher n’a pas tout à fait tort – Editorial, Olivier Delacrétaz
- Morgenstraich – Jean-François Cavin
- Gripen: le nez des opposants s’allonge – Pierre-Gabriel Bieri
- Philippe Jaccottet, troisième Vaudois dans la Pléiade – La page littéraire, Yves Gerhard
- Le Journal de Moudon fête ses 175 ans – Aspects de la vie vaudoise, Frédéric Monnier
- Histoires de pâturages – Aspects de la vie vaudoise, Frédéric Monnier
- Conte d’hier pour jeunes d’aujourd’hui – Aspects de la vie vaudoise, Cédric Cossy
- Recettes du terroir vaudois en vidéo – Aspects de la vie vaudoise, Frédéric Monnier
- Les quatre Passions de J.-S. Bach – Aspects de la vie vaudoise, Frédéric Monnier
- Non à un salaire minimum légal – Pierre-Gabriel Bieri
- Soins médicaux de base – Cédric Cossy
- Les peuples maîtres de leur destin? – Jean-François Cavin
- Nos voisins et nos exilés – On nous écrit, Olivier Delacrétaz
- Gripen: what else? – Le Coin du Ronchon