Des citoyens comme les autres?
Dans quelques manifestations de «désobéissance civile» se sont trouvés impliqués des enseignants universitaires, parfois activement, ou alors comme soutien moral et tenants de l’immunité pénale des délinquants adeptes d’une grande cause. Ces personnes rémunérées par l’Etat peuvent-elles plaider pour l’illégalité, voire y tomber elles-mêmes? Leur situation, ressentie comme éminente, entraîne divers commentaires. A l’Université même, un groupe de travail plancherait sur le sujet de la «prise de parole» du corps professoral sur les thèmes militants et activistes. Dans 24 heures, un éditorial de M. Emmanuel Borloz évoque la délicate question de la désobéissance civile au nom du climat, de sa dimension par définition illégale dont on sent bien qu’elle gêne aux entournures. Non, l’Université ne peut pas tout laisser passer. Mais les individus qui la composent sont avant tout des citoyens. Il poursuit sur ce ton mi-figue mi-raisin sans vraiment conclure. Dans le genre contorsionniste, c’est assez réussi.
La loi, c’est la loi, et un grade ou une distinction académique ne justifie en rien qu’on la viole, ou qu’on recommande de la violer. Un prix Nobel de chimie couronne l’excellence scientifique, mais ne délivre pas un laisser-passer outre les normes légales, ni d’ailleurs un brevet d’intelligence politique. Si, forts d’un savoir qui les placerait au-dessus du commun des mortels, des professeurs ou des chercheurs adoptent la posture du prophète, qu’ils en paient le prix devant les tribunaux. Ils se réjouiront d’ailleurs que la condamnation leur confère l’auréole des martyrs.
Cela n’astreint pas les membres du corps professoral au silence. Sur la place publique et dans l’arène politique, ils peuvent fort bien exprimer leur opinion et siéger dans les conseils élus. Dans les matières qu’ils maîtrisent, leurs avis peuvent être éclairants. Nous ne voyons même pas d’inconvénient à ce qu’ils affichent leurs convictions dans leur enseignement, car les étudiants sont adultes, en principe intelligents, et savent discerner l’information du plaidoyer. L’enseignant fera bien, tout de même, de signaler quand sa leçon tourne à la profession de foi.
La mission de l’Université est orientée vers la recherche de la vérité. En ce sens, pour être digne de son rang, le professeur ou le chercheur reconnu se doit, évitant la propagande biaisée et les slogans tordus, et se gardant de dire légal ce qui est illégal, de manifester son engagement politique dans un esprit de probité intellectuelle et de respect de la réalité. A ce titre, il n’est pas tout à fait un citoyen comme les autres.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- Actualités d’une doctrine – Editorial, Félicien Monnier
- La journée d’histoire vaudoise de l’UPL – Lionel Hort
- Avoir la politique de ses moyens – Cédric Cossy
- Occident express 87 – David Laufer
- La honte de l’Europe – Olivier Delacrétaz
- Planification hospitalière vaudoise: la descente aux enfers – Jean-François Luthi
- Encore des faits – Jacques Perrin
- La haute ville de Moudon – Yves Gerhard
- Ce qu’il fallait démontrer – Le Coin du Ronchon