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Une initiative populaire sur l’épargne-logement

Antoine Rochat
La Nation n° 1932 13 janvier 2012
Le 11 mars 2012, les votations populaires fédérales comprendront cinq objets, dont une initiative sur l’épargne-logement. De quoi s’agit-il?

Rappel du contexte

La Constitution fédérale donne mandat à la Confédération d’encourager l’accession à la propriété ou, plus précisément, «l’acquisition d’appartements et de maisons familiales destinées à l’usage personnel de particuliers» (art. 108 al. 1 Cst. féd.). La charte fondamentale confère également à la Confédération des compétences en matière d’harmonisation fiscale (art. 129 Cst. féd.).

De l’application de ces deux principes découle le fait que les déductions fiscales cantonales destinées à encourager l’épargne en vue de l’acquisition d’un logement ne sont plus possibles en Suisse. Or, ces déductions existent depuis plusieurs années dans le demi-canton de Bâle-Campagne, où elles connaissent paraît-il un certain succès.

Les partisans de l’épargne-logement ont d’abord tenté d’agir par voie de motion, puis dans le cadre du paquet fiscal (rejeté en 2004 à la suite du référendum des cantons), et enfin par deux initiatives populaires.

Le Conseil fédéral, suivi par les Chambres, soumet séparément ces initiatives au vote du peuple et des cantons, en proposant de les rejeter. Nous voterons le 11 mars prochain sur le premier de ces deux textes (et sans doute ultérieurement sur le second).

Présentation de l’initiative

Déposée le 29 septembre 2008 avec plus de 142000 signatures valables, l’initiative s’intitule «Pour un traitement fiscal privilégié de l’épargne-logement destinée à l’acquisition d’une habitation à usage personnel ou au financement de travaux visant à économiser l’énergie ou à préserver l’environnement (initiative sur l’épargne-logement)».

Ce texte propose l’introduction de deux articles nouveaux dans la Constitution fédérale (art. 129 a et 129 b), dont les principaux éléments sont les suivants:

  • les cantons peuvent exonérer les dépôts d’épargne pour permettre l’acquisition d’un premier logement ou pour des mesures d’économie d’énergie du logement principal;
  • la durée d’épargne est limitée à dix années consécutives;
  • les montants exonérés sont limités (par exemple Fr. 15000.– par an et par personne pour l’acquisition du logement);
  • les déductions valent pour l’impôt sur le revenu comme pour celui sur la fortune.

Arguments du pouvoir fédéral

Le message du Conseil fédéral du 18 septembre 2009 (FF 2009 pp. 6313 à 6346) relève cinq défauts principaux de l’initiative:

a) le mandat constitutionnel d’encourager l’accession à la propriété est déjà rempli, par le recours possible aux versements anticipés de la prévoyance professionnelle (2e pilier) et par l’imposition modérée de la valeur locative;

b) l’initiative ne profiterait qu’à une minorité de contribuables aisés et créerait ainsi des inégalités;

c) l’épargne-logement aurait des effets négatifs sur le plan économique: blocage de capitaux sur une longue durée et risque de hausse des prix des terrains;

d) l’initiative aboutirait à une complexification du droit fiscal;

e) l’initiative ne respecte pas les principes de l’harmonisation fiscale, puisqu’elle ne prévoit pas de déduction au titre de l’impôt fédéral et qu’elle ne serait utilisée que dans certains cantons.

Notre analyse

Les arguments du Conseil fédéral, suivis par les Chambres, n’emportent pas l’adhésion.

L’utilisation des fonds du 2e pilier a certes permis d’augmenter le nombre de propriétaires, mais elle n’est pas sans risque sur les retraites futures des intéressés. Quant à l’imposition de la valeur locative, elle est maintenant indexée dans notre Canton, et les propriétaires vaudois voient le revenu (fictif) de leur logement augmenter inexorablement chaque année.

Les arguments égalitaires et économiques nous paraissent tenir davantage du parti pris politique que de l’argumentation juridique fouillée.

La complexification du droit fiscal est certes réelle, mais elle tient davantage à l’action des législateurs et des juges qu’à celle des initiants.

Enfin, l’argument de l’harmonisation fiscale est particulièrement faible, au regard de son pendant, la souveraineté fiscale des cantons.

Conclusion

Les deux initiatives populaires sur l’épargne-logement ont chacune leurs qualités et leurs défauts. Il est regrettable que les Chambres fédérales n’aient pas voulu élaborer un contre-projet reprenant leur aspect essentiel: encourager l’épargne en vue de l’acquisition du logement est un principe juste, auquel aspirent de nombreux Helvètes. Même si le texte proposé n’est pas parfait, nous voterons OUI à l’initiative sur l’épargne-logement le 11 mars prochain.

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