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Le roi qui écoutait son peuple

Rédaction
La Nation n° 1993 16 mai 2014

La revue en ligne Prévoyance Actualités du 27 mars 2014 s’intéresse naturellement de près à la réforme Prévoyance vieillesse 2020. Son éditorial résume de manière imagée la suite que pourrait prendre le projet au vu des prises de positions inconciliables récoltées lors de la consultation officielle.

Il était une fois un roi qui voulait le bien de son peuple. Il désirait que tous les animaux vieux et affaiblis disposent d’un abri confortable et reçoivent assez à manger sans avoir à chasser ou à rechercher leur nourriture. Pour cela, il eut l’idée de créer des mangeoires et des abris ouverts à tous. Dans sa grande sagesse, le roi voulut cependant consulter son peuple pour trouver une solution capable de satisfaire les besoins de tous les animaux. Il engagea un singe pour mener le dialogue avec eux.

Lorsque le roi fit part de son projet à son peuple, il suscita d’abord l’enthousiasme général. Mais bientôt, les girafes expliquèrent au singe qu’il fallait tenir compte de leur long cou et prévoir des mangeoires assez hautes pour elles. Les serpents vinrent au contraire réclamer des mangeoires assez basses pour eux en précisant qu’ils appréciaient les souris vivantes pour leur déjeuner. Ce fut ensuite au tour des souris d’exprimer des inquiétudes: elles ne voulaient pas habiter à proximité des serpents âgés et souhaitaient également des mangeoires séparées. Contrairement aux serpents, les scarabées ne voulaient que des animaux morts à manger. Les oiseaux demandaient simplement que leur mangeoire soit juste au-dessus des scarabées ou des souris, sans marquer de préférence pour ce qu’il y aurait au menu. Les hyènes se montraient intéressées par un voisinage avec les scarabées et les animaux morts. Les gnous refusaient qu’on leur assigne une place à proximité des hyènes et ne voulaient pas des mangeoires des girafes, trop hautes pour eux. Les crocodiles étaient prêts à renoncer à une mangeoire à condition de pouvoir s’installer à côté des gnous, une solution que les guépards voyaient également d’un bon œil. Les serpents déclarèrent alors qu’eux aussi pouvaient se passer de mangeoire si on leur donnait la possibilité de nicher près des souris.

Les renards des steppes remarquèrent que tous ces projets étaient de toute façon absurdes car le roi, qui n’avait jamais eu à trouver sa nourriture, ne comprenait rien au problème: il n’y avait pas assez à manger pour tous les animaux. Ils proposèrent donc de mettre seulement la moitié de la quantité de nourriture nécessaire à la disposition de chacun des animaux.

De la sorte, tous les animaux devraient certes se priver mais bénéficieraient au moins d’un traitement équitable. Les serpents, les crocodiles, les guépards et les oiseaux approuvèrent cette solution pour autant que leurs autres souhaits soient pris en compte.

Les scarabées affirmèrent pour leur part que l’issue du débat leur importait peu car ils ne vivraient pas vieux. Les souris, convaincues que toute solution serait à leurs dépens, déclarèrent qu’elles ne participeraient pas au projet. Ce fut alors au tour des serpents de se retirer, puis des oiseaux. Les gnous et les girafes menacèrent également de se désister si les mangeoires n’étaient pas à la hauteur adéquate pour chacun, estimant qu’ils n’avaient pas à accepter de compromis. Voyant que de nombreux animaux abandonnaient le projet, les renards des steppes jetèrent l’éponge. Les crocodiles et les guépards avaient eux aussi renoncé, n’ayant plus intérêt à participer depuis le départ des gnous.

Lors de la réunion de crise, les hyènes restèrent seules avec le singe que le roi avait désigné pour conduire le projet. Elles le dévorèrent et quittèrent la séance. Aujourd’hui, le roi se demande encore quelle faute il a commise.

KASPAR HOHLER

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